Et si on parlait du Grand Remplacement … Mais à froid !

Publié par le 2 Sep, 2019 dans Blog | 0 commentaire

Et si on parlait du Grand Remplacement … Mais à froid !

Angoisse réelle à droite ou fantasme dénoncé par la gauche, il est parfois difficile d’évaluer la part de vérité dans le Grand Remplacement, théorisé par Renaud Camus en 2010.

Dans un ouvrage intitulé :  Le Grand Remplacement, réalité ou intox ? Jean-Paul Gourévitch et Pierre-Guillaume de Roux ont réalisé un travail remarquable, qui fera référence sur cette question qui clive beaucoup les Français.

Olivier Maurin nous présente ce livre dans Le Club de Valeurs actuelles dans un article titré :

Le “grand remplacement” en question

Dans une étude méthodique et dépassionnée, Jean-Paul Gourévitch montre que le “grand remplacement” théorisé par Renaud Camus n’est pas inéluctable, mais qu’il s’agit d’un scénario crédible.

Pour la majorité des médias et des hommes politiques de ce pays, l’affaire est entendue : la théorie selon laquelle on assisterait en France à un “grand remplacement” de population, qui trouve de plus en plus d’écho dans la société, est un fantasme d’extrême droite reposant sur une peur irrationnelle de l’Autre, une « sinistre farce » (Hervé Le Bras) qui tire son origine dans le nationalisme de la fin du XIXe siècle et son « vieil imaginaire de purification de la société de ses éléments allogènes » (Nicolas Bancel). Et d’ailleurs « jusqu’où faut-il remonter pour être considéré faisant partie du peuple français ? », questionnait la démographe Pascale Breuil, interrogée par le Monde sur ce sujet en janvier 2014, avant de conclure qu’il était « très difficile de définir qui est ou non d’origine française ». Très difficile dans les laboratoires de l’Insee, serions-nous tenté d’ajouter, car sur cette question l’homme ordinaire, guidé par son instinct, éprouve beaucoup moins de difficultés à définir les choses, et ne s’embarrasse ni de concepts, ni d’idéologie, ni même de documents administratifs dûment estampillés, et pas plus de biologie, de “race” ou de “pureté” imaginaires : est français celui qui a la nationalité française, bien sûr, pourvu qu’il vive selon les mœurs françaises.

Le vrai fossé entre le peuple et ses élites est là, et explique largement la différence de perception de l’immigration : le premier se voit encore comme appartenant à un peuple uni par un imaginaire, des mœurs et des croyances, en dépit des origines, quand les secondes ne s’attachent plus qu’au caractère juridique de la nationalité. Pour le dire plus crûment : une femme voilée de la troisième génération issue de l’immigration musulmane sera française aux yeux des démographes (et des statisticiens), mais demeurera largement “étrangère” dans la conscience d’une grande partie des Français, posant, à une certaine échelle, le même problème que celui de l’immigration stricto sensu : la destruction progressive d’une civilisation et d’un mode de vie au profit d’une autre civilisation et d’un autre mode de vie ; c’est le “grand remplacement” théorisé pour la première fois par l’écrivain Renaud Camus en 2010, lequel y voit « le choc le plus grave qu’ait connu notre patrie depuis le début de son histoire puisque, si le changement de peuple et de civilisation, déjà tellement avancé, est mené jusqu’à son terme, l’histoire qui continuera ne sera plus la sienne, ni la nôtre ».

Le problème, c’est que certains partisans de cette théorie sont dans un tel état de fébrilité qu’un petit vademecum d’aide et de conseils juridiques aux migrants trouvé chez des militants associatifs devient pour eux la preuve irréfutable du complot visant à nous “grand-remplacer” ! Bref, entre les partisans du “tout va très bien madame la marquise” et ceux du “tous musulmans dans quinze ans”, il est difficile de s’y retrouver.

C’est dire tout l’intérêt du dernier livre de Jean-Paul Gourévitch qui a décidé de prendre au sérieux cette théorie, de la confronter à des chiffres sourcés et à des faits avérés et « d’expliciter les enjeux des deux questions majeures qui sont le support de la théorie du “grand remplacement” : les migrations et l’islam » , le tout sans passion et sans parti pris, laissant in fi ne le lecteur se forger sa propre opinion. Les collègues de ce spécialiste de l’islam et des migrations feraient bien de s’inspirer de l’objectivité de son approche qui apporte un peu d’air frais à une époque où, comme le dit Renaud Camus, il ne s’agit plus de se poser la question “est-ce vrai ?” mais “a-t-on le droit de le dire ?”.

S’intéresser sérieusement à la question du “grand remplacement” nécessite bien entendu de commencer par s’arrêter aux chiffres de l’immigration et c’est là que tout se complique. Le problème des statistiques, on le sait, c’est qu’on leur fait dire ce que l’on veut ( « Je ne crois aux statistiques que lorsque je les ai moi-même falsifiées », disait Churchill), mais c’est aussi et surtout qu’elles ne procèdent pas des mêmes critères selon qu’elles sont produites par les instituts officiels français sur l’immigration (Insee et Ined), les organismes internationaux (Eurostat, Frontex… ) ou les organisations non gouvernementales spécialisées (Migrinter, Migration Watch, Migration Policy Group… ), si bien qu’il faut les confronter à d’autres études pour se faire une idée du pourcentage d’immigrés vivant dans notre pays. Gourévitch en profite pour dénoncer les grossières manipulations de l’Insee et les approximations de nombreux journalistes qui s’emmêlent les pinceaux avec les chiffres, volontairement ou non.

Après avoir analysé et critiqué les données disponibles, l’auteur retient les chiffres de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) publiés en octobre 2018 et établissant à 11 % de la population résidente la part des immigrés en France, 25 % si on prend en compte les enfants de la seconde génération issue de l’immigration. À quoi il faut ajouter l’indicateur conjoncturel de fécondité établi à 1,88 enfant par femme en 2017, moins de 1,8 pour les femmes descendantes d’autochtones, 2,02 pour celles descendantes d’immigrés et 2,73 pour les femmes immigrées.

Un quart de la population en lien direct avec l’immigration et une dynamique démographique, ce n’est plus tout à fait le fantasme dénoncé par la presse bien-pensante, mais ce n’est pas non plus le “grand remplacement”.

La vraie question à ce stade est de savoir si cette minorité n’exerce pas un pouvoir d’attraction supérieure à sa représentativité ; autrement dit, si elle n’est pas dans une dynamique culturelle propice à imposer sa culture et ses mœurs à la culture et aux mœurs des Français autochtones.

Parmi les immigrés ou fils d’immigrés résidant en France, Gourévitch estime entre 7,5 millions et 9 millions le nombre de musulmans, avec une population plus jeune de treize ans en moyenne ; 41 % d’entre eux se déclarent croyants et pratiquants, 34 % croyants mais non pratiquants et 25 % d’origine musulmane ou sans religion, les deux tiers pratiquant néanmoins le ramadan.

Pour les historiens de l’immigration Patrick Weil et Gérard Noiriel, les différentes vagues d’immigration ont toutes créé des tensions et suscité des peurs avant de se fondre dans le “creuset français” et il n’y a aucune raison pour que cela change. Pourtant, il est possible que cette certitude orgueilleuse concernant l’attractivité du modèle républicain “universel” et la croyance en une condamnation inéluctable de la religion par la modernité soient le péché originel des politiques d’immigration. Ils finiront par mettre leur religion en sourdine et par s’intégrer, nous répète-t-on depuis quarante ans.

Sur le terrain, c’est pourtant l’inverse qui s’observe, avec une affirmation de plus en plus forte de “l’identité musulmane” et un fossé de plus en plus béant entre les modes de vie des immigrés et personnes issues de l’immigration récente, et ceux des autochtones.

Dans les territoires où ils sont majoritaires, les musulmans ont tendance à s’affranchir des lois de la République et à imposer leurs coutumes et leurs modes de vie, ce qui a valu cette célèbre mise en garde du ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, le jour où il quittait son ministère : « Je suis allé dans tous ces quartiers […] , la situation est très dégradée et le terme de reconquête républicaine prend là tout son sens. Aujourd’hui, c’est la loi du plus fort qui s’impose, celle des narcotrafiquants et des islamistes radicaux, qui a pris la place de la République. […] Dans la périphérie parisienne, on ne peut plus continuer à travailler commune par commune, il faut une vision d’ensemble pour recréer de la mixité sociale parce qu’aujourd’hui on vit côte à côte et je crains que demain on ne vive face à face. » Un face-à-face qui n’attendra qu’une étincelle pour se transformer en affrontement et qu’un homme d’État digne de ce nom devrait tout faire pour éviter.

Olivier Maurin pour Valeurs actuelles.

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