Un « Media Culpa » bien timide …

Publié par le 20 Déc, 2018 dans Blog | 0 commentaire

Un « Media Culpa » bien timide …

Je tombe, ce matin, sur un article des Echos intitulé :

« Gilets jaunes » : notre « Media culpa »

Je me dis : ça y est, certains journalistes qui comme les politiques et les syndicats qui n’ont rien vu venir dans la crise des Gilets jaunes, vont se livrer à une introspection et tenter de retrouver ce que devrait être le vrai métier de journaliste : informer, expliquer et non pas éduquer et faire la morale comme ils le font presque tous …

Je vous livre le contenu de cet article que l’on doit à Guy Birenbaum et Laurent Guimier, deux pointures du paysage médiatique français.

Mais, je le crains, comme moi, vous serez déçus ! Car faire un mea culpa de journaliste, sans jamais prononcer les mots de bien-pensance, politiquement correct et partialité est un exploit que seuls des journalistes de haut vol pouvaient réussir !

On relèvera tout au plus le quart de la moitié d’une auto-critique :

Quittons davantage nos bureaux et le commode « journalisme de commentaire » pour aller au-devant de nos concitoyens.

Journalisme de commentaire que je corrigerai plutôt bien souvent en journalisme militant !

Voici leur mea culpa bien trop tiède :

Crédit photo : Les Echos – Shutterstock

Pour Guy Birenbaum et Laurent Guimier, les médias doivent profiter du moment historique actuel pour se réinvestir dans les missions qu’ils ont oubliées.

Citoyens oubliés, déclassés, dégoûtés, révoltés, politiques arrogants, hors-sol, journalistes corporatistes et déconnectés, liens politique et social rompus, dégagisme à tous les étages… Depuis près de quarante ans la France laisse de côté une partie de plus en plus importante du peuple. Pas question d’analyser ici toutes les occasions ratées par les pouvoirs successifs. En revanche, avec humilité, nous pouvons poser quelques jalons sur le rôle du « pouvoir médiatique ».

Ne faisons plus comme si la crise ne nous concernait pas. Car le désaveu par une majorité de Français de l’objectivité à laquelle nous prétendons est aussi un des signes de la grave rupture française. Des citoyens en nombre croissant n’ont plus aucune confiance dans la manière dont nous travaillons et assimilent « les » journalistes aux politiques, à leur distance, à leurs erreurs.

Zone de non-média

Les événements récents ont mis au jour les racines profondes de cette rupture médiatique : l’irruption de Facebook dans la « vraie vie ». Ce qui restait cantonné sur Internet a escaladé les murs de la virtualité, fait irruption dans nos rues et nos studios. Cette colère, sans modération, n’a que faire des habits « convenables »  des corps intermédiaires, et s’exprime indifféremment et mot pour mot sur les réseaux sociaux, sur nos ronds-points, dans nos micros et sur les plateaux. Il n’y aura pas de retour en arrière.

C’est que la multiplication des canaux, des chaînes d’information et les réseaux sociaux ont bouleversé le rapport des citoyens aux faits comme au débat. Il ne nous suffira plus de nous lamenter sur le « pire » qui circule ! A l’inverse, profitons de ce moment historique pour nous réinvestir dans des missions que nous avons oubliées. C’est de confiance perdue dont il est question. Il n’y a plus de promesses possibles, juste des preuves, donc des actes.

D’abord, écoutons et regardons. Quittons davantage nos bureaux et le commode « journalisme de commentaire » pour aller au-devant de nos concitoyens. Il ne doit plus exister de zone de non-média. Mais surtout, quand nous sommes venus, ne nous contentons plus d’un aller sans retour ! Restons assez longtemps pour comprendre et, surtout, revenons ! Car partir et ne plus revenir, c’est abandonner une deuxième fois.

Ensuite, ressemblons davantage aux Français. Diversifions nos talents. Nous n’offrons pas assez leur chance à tous ceux qui ne sortent pas du « moule » parisien.  Pas assez d’accents, pas assez de provinciaux, pas assez de diversité dans les médias nationaux.

Il est également vital de mieux accomplir nos tâches de vérification des informations, mais en prenant garde de ne pas donner de leçons. Si tant de fake news irriguent les mouvements politiques et sociaux, c’est que nous n’avons pas encore trouvé les bons formats pour (r) établir les évidences. Là aussi, faisons preuve de davantage d’humilité. Surtout, cessons de considérer nos publics comme simplets. Ils perdront leurs préjugés quand nous abandonnerons les nôtres !

Professionnels du débat

Enfin, il nous faut mieux participer à l’organisation du débat public. Aidons ceux qui ne s’entendent plus, ne se parlent plus à se rencontrer en terrain non piégé. Nous parlons de débats destinés à trouver des solutions, pas de clashs stériles uniquement faits pour doper l’audience. Ayons confiance en l’intelligence de nos publics. Là encore, soyons intègres et aidons ceux qui n’ont pas la technique médiatique nécessaire à ne pas être délégitimés par des « professionnels du débat ». Notre responsabilité est de garantir l’équité et l’équilibre entre tous. La formation, l’éducation et l’égalité face aux médias font partie de nos missions, nous l’avons oublié.

C’est à ces conditions que nos médias – dont seules les dictatures se passent – échapperont au sort funeste d’une « aristocratie médiatique » renversée par cette révolution IRL [« in real life », NDLR]. Il en va non pas de la survie d’une corporation mais de l’avenir de notre démocratie.

Laurent Guimier est vice-PDG d’Europe 1, Virgin Radio et RFM. Guy Birenbaum est son conseiller.

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