Big Mother veille sur nous …

Publié par le 16 Juil, 2019 dans Blog | 0 commentaire

Big Mother veille sur nous …

L’Etat est devenu la nounou des Français !

Ils y sont devenus accros et attendent tout de l’Etat.

Je me souviens d’un reportage réalisé successivement en France et aux Etats-Unis, à la suite d’une catastrophe naturelle ayant endommagé des maisons. En France, on interviewait un propriétaire qui attendait un éventuel classement en catastrophe naturel avant de se lancer dans les réparations. Dans le Middle West américain, où les habitants se relevaient du passage dévastateur d’une tornade, on interrogeait un homme en haut d’une échelle en train de reconstruire la charpente de son garage détruit …

« Et donc vous, mes compatriotes américains, ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays.  » avait déclaré John Fitzgerald Kennedy, dans son discours inaugural de son mandat de président.

Une déclaration qui a perdu beaucoup de sons sens en France, aujourd’hui.

Denis Tillinac revient sur l’omniprésence de l’Etat-Providence dans sa chronique de Valeurs actuelles :

Fragiles et irresponsables: voilà comment nos gouvernants nous voient. Et ils seraient là pour nous assurer confort, santé, bonheur et conseils en tout genre.

 

Il n’est pas inconvenant sous nos latitudes qu’il fasse chaud au mois de juin. Ces jours derniers un peu plus que d’habitude au début de l’été, mais la psychose météorologique attisée par les autorités publiques et les médias confine au délire paranoïaque. Il y eut des « réunions de crise » dans le bureau du ministre de la Santé, et d’innombrables incitations à la vigilance d’un État devenu doudou et nounou. C’est trop de sollicitude. Dame catéchiste de la modernité, Big Mother veille sur notre santé, physique et morale. Elle veut notre bonheur et nous rappelle obligeamment qu’en cas de grosse chaleur il faut boire de l’eau, chercher l’ombre et se munir de ventilateurs. Coups de soleil à éviter pour les seniors et les nourrissons. On s’en doutait avant que nous soit infligé à perte de temps un pathos alarmiste sur les méfaits de la « canicule ».

Denis Tillinac

Aux abris, citoyens, il fait chaud, ce supposé dérèglement de dame Nature ne promet rien de bon! Bien évidemment, les intégristes de l’écologie en rajoutent sur la menace d’une apocalypse prochaine en dégainant leur « réchauffement climatique ». Des experts en climatologie ont beau émettre des doutes, la doxa veut que cette calamité satanique soit sans précédent depuis la chute de Sodome et Gomorrhe. On ne l’incriminait pas encore à l’été 2003, dit « de la canicule ». Le gouvernement n’en fut pas moins accusé d’imprévoyance, et le ministre de la Santé, Mattei, y perdit son portefeuille. Des gloses complotistes se propagèrent au café du Commerce. Ainsi Chirac, président à l’époque, fut-il suspecté d’avoir été alerté par quelque instance secrète. Laquelle ? On ne précisait pas, mais on relevait qu’il avait choisi de passer ses vacances au Canada, où il faisait moins chaud qu’en Corrèze ou à Brégançon.

Je me souviens d’avoir croisé, à la fin de cet été, un ministre dans un restaurant parisien. Il semblait accablé. Rien de vraiment grave n’est advenu, m’expliqua-t-il, et cependant on nous reproche d’avoir assassiné 14 000 vieillards. Rien de moins. Avec le recul et statistiques à l’appui, il s’avéra que les morts, à quelques exceptions près, n’auraient pas longtemps survécu sous une température plus clémente. C’était le plein été. La plupart des entreprises de pompes funèbres avaient fermé boutique, ou tournaient au ralenti avec des effectifs réduits. En outre, les vacanciers, peu soucieux de perdre des jours de location pour aller inhumer un papi ou une tatie, savaient que les morts désormais peuvent patienter en toute sécurité … à l’abri de la chaleur. D’où les encombrements dans les morgues des hôpitaux.

Ce que révéla cet épisode en soi presque anodin, c’est l’égocentrisme de nos contemporains et leur propension à se défausser sur l’Etat, censé nous protéger de tout: le chaud, le froid, la maladie, la violence, la vieillesse, la solitude, la mort. Tandis que l’on palabrait sans fin sur l’absence de mesures préventives, la guerre tuait  en d’autres lieux des humains par dizaine de milliers sans que les médias s’en soucient le moins du monde. Moralité, si l’on peut dire: dans la post-modernité, le confort de l’individu prime toute autre considération, réduisant le politique aux acquêts d’un pourvoyeur de bien-être sommé de nous soustraire aux aléas de l’existence. Ce que les politologues appellent le « care« .

Il en résulte un double sentiment de fragilité et d’irresponsabilité. Fragilité car l’individu, privé d’armature morale, perd la boule quand son ego est menacé dans sa quiétude. Alors il se délite, ou bien il montre les crocs. Irresponsabilité car cet ego que la frénésie consumériste peine à sécuriser dans son quant à soi, les gouvernants l’infantilisent pour « gérer » ses menus tracas. Nos sociétés – la « vieille Europe », disent les Américains – semblent bien démunies pour affronter les chambardements majeurs qui s’annoncent. Oublieuses de leur mémoire, tétanisées par un avenir qu’elles sont incapables d’appréhender, elles surajoutent une dose d’humiliation à nos angoisses en nous accablant de préceptes hygiénistes. Il fait déjà moins chaud à l’heure où j’écris ces lignes, mais ne baissez pas votre garde, citoyen de Boboland : on annonce du vent la semaine prochaine.

Denis Tillinac pour Valeurs actuelles.

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