Jupiter descendu en flammes par le New York times

Publié par le 9 Sep, 2017 dans Blog | 0 commentaire

Jupiter descendu en flammes par le New York times

Il n’est pas inintéressant de lire ce que dit la presse étrangère de notre pays et plus particulièrement de notre président jupitérien !

Cela nous changera de la complaisance de notre presse toujours déformée par le prisme idéologique qui gauchise systématiquement sa vision.

Je vous propose ainsi la traduction*** d’un article paru le 7 septembre dernier dans le New York Times :

« Emmanuel Macron sera encore une autre président français en échec »

Le président français, Emmanuel Macron est le nouveau porte-drapeau du libéralisme. Accueilli comme la réponse à la vague populiste qui atteint l’Europe, il a remis la diplomatie française en lumière en faisant face au président Trump et au président Vladimir Poutine. la « méthode Macron », comme l’a décrite un « think tank » leader en Europe, est la nouvelle « troisième voie » entre technocratie et populisme.

A la maison, en France, c’est une autre histoire ! Un récent sondage a indiqué que la popularité de monsieur Macron avait chuté de 14 points en août, après une chute de 10 points en juillet. Seulement 40 % des sondés se disent satisfaits des performances du président.

Pour être honnête, M. Macron n’a jamais eu de réelle adhésion populaire. Au premier tour de l’élection présidentielle, en avril, alors que les votes se répartissaient  parmi 4 candidats, Macron arrivait à moins de 24 %. En comparaison, François Hollande avait recueilli 28 % des votes en 2012 et Nicolas Sarkozy 31 % en 2007 ! M. Macron gagna le second tour mais uniquement parce qu’il était le moins mauvais candidat, son adversaire étant Marine Le Pen la présidente du Front national, un parti populiste d’extrême droite.

Mais l’arithmétique électorale n’explique pas tout ! La popularité de M. Macron souffre de quelque chose de plus fondamental : le «  macronisme » ! Son projet politique a été bien trop focalisé sur sa personnalité. Une grande partie de son attrait provient de sa jeunesse, de son dynamisme, de sa beauté et de son habileté oratoire. Cette approche hyper-personnalisée a toujours porté le risque qu’une fois le charme passé, il ne reste plus rien pour ses supporters, ce qui est exactement en train d’arriver !

Depuis son entrée en fonction, il a renvoyé beaucoup de personnes en tentant de restaurer la grandeur de la présidence. Dans une phrase qui pourra lui coller à la peau pour le reste de son mandat, il avait déclaré qu’il voulait  rendre la présidence plus « jupitérienne » se comparant ainsi au puissant dieu romain Jupiter qui gouvernait les cieux ! Lorsqu’il réunit le Sénat et l’Assemblée nationale en congrès à Versailles, il leur parla de ses ambitions présidentielles. Beaucoup en France dénoncèrent ses accents monarchiques.

Cette attitude arrogante vis-à-vis du pouvoir a détruit l’image initiale anti-système que M. Macron avait cultivée durant sa campagne. Le projet « post-idéologique » sur lequel il s’est fait élire commence à se révéler pour ce qu’il est :

un vide au coeur de son projet politique !

Les deux grands objectifs stratégiques de M. Macron sont de débloquer l’économie et de relancer l’Europe. Il est allé jusqu’à décrire sa politique économique comme une « révolution copernicienne», mais il ne fait que pousser la France un peu plus loin sur la voie de la déréglementation du marché du travail et de l’austérité budgétaire, un chemin déjà largement suivi par d’autres pays.

Le nouveau président dit qu’il est déterminé à faire de la France une « nation start-up », empruntant le vilain langage de la Silicon Valley. Cela lui a valu le soutien des investisseurs et des milliardaires de la technologie mais n’a pas encore convaincu le grand public français. Le contrat social libéral de la Silicon Valley, avec son attitude peu soucieuse d’égalité, est peu apprécié par une population élevée dans la tradition social-démocrate de l’après-guerre en France.

Son objectif principal est de réduire le taux de chômage de la France qui, à environ 10 % de la population, reste obstinément élevé. Il espère le faire en réformant le code du travail. L’une des nouvelles mesures est le plafonnement des indemnités de licenciement que les tribunaux prudhommaux peuvent accorder aux travailleurs après un licenciement injustifié, une mesure destinée à donner aux employeurs plus de confiance pour embaucher des salariés. Une autre disposition permettrait aux entreprises de moins de 50 salariés de négocier des accords sans avoir à passer par les syndicats. L’extrême gauche française l’a qualifié de « coup d’état social », mais le président a pris soin de ne pas céder totalement au lobby des entreprises.

Ce qui importe vraiment c’est le point final d’arrivée. Toute chute soutenue du chômage en France serait la bienvenue, mais les expériences d’autres pays suggèrent que cela vient au prix de nouvelles formes d’inégalité. En Allemagne, les réformes du marché du travail ont entraîné une prolifération des « mini-jobs », un travail à temps partiel peu réglementé, qui a remplacé les emplois à plein temps dans certains secteurs. Dans le marché du travail hautement déréglementé de la Grande-Bretagne, les niveaux records d’emploi existent parallèlement à la faible productivité, à la stagnation des salaires et à la prolifération de contrats de courte durée. Est-ce le futur que la France veut ?

Après le boom économique des années 50 et 60, le capitalisme en Europe n’a plus été assez dynamique pour combiner un niveau élevé d’emplois avec des progrès importants à long terme pour les populations. Aujourd’hui, les choix à opérer impliquent des compromis douloureux. Les choix économiques de M. Macron favorisent les employeurs au détriment des travailleurs et compromettent ce qui reste de l’Etat-providence français.

Mais craignant de donner à son programme un réel contenu politique, le président enrobe ses réformes dans le drapeau européen. Il dit aux électeurs français, que, s’ils font des efforts en France, le reste de l’Europe – et en particulier l’Allemagne – les prendra au sérieux et qu’au final ils en tireront un plus grand profit.

Les projets européens de M. Macron incluent un budget commun et un ministre des finances pour la zone euro. Ses idées ont reçu un accueil chaleureux de la part de Berlin, et il y a des signes qu’un tel accord pourrait être possible après les élections fédérales d’Allemagne, le 24 septembre. Mais si la chancelière Angela Merkel gagne, son mandat ne sera pas pour une union fiscale européenne où les recettes fiscales de l’Allemagne seraient placées dans un pot européen commun. Elle n’a apporté son soutien qu’à une version très réduite de ce que M. Macron propose. Le gain pour tous les sacrifices consentis par la France sera faible – et le président ne sera certainement pas plus populaire après qu’il ne l’est aujourd’hui.

Le succès de M. Macron lors de l’élection présidentielle de juin a secoué le paysage politique français moribond  d’une manière profonde et durable.En cela, il doit être remercier. Mais en tant que projet politique, le macronisme n’est que rhétorique et orgueil, soutenus par des politiques néolibérales classiques. Pour l’instant, M. Macron est toujours le chouchou de l’élite libérale mondiale, mais son impopularité croissante nous donne une meilleure image de ce qu’il a à offrir.

Chris Bickerton pour The New York Times.

Chris Bickerton (@cjbickerton) is a lecturer in politics at Cambridge University and the author of “The European Union: A Citizen’s Guide.”

*** La traduction a été faite par mes soins, avec toutes les réserves que ça comporte … Si des anglicistes distingués ont des remarques à faire sur la traduction, je les prendrais volontiers en compte  … (texte original disponible ici)

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