Le vote Macron ? Les vieux et les bourgeois !

Publié par le 12 Avr, 2022 dans Blog | 3 commentaires

Le vote Macron ? Les vieux et les bourgeois !

Dans mon précédent article :

Elections : ceux qui jubilent … certains en douce !

je pointais le soutien aveugle des retraités pour Emmanuel Macron qu’ils considéraient comme leur sauveur du covid !

Je tombe de matin, dans Marianne,  sur une interview de Christophe Guilluy, le fameux théoricien de « la France périphérique » qui conforte ma position.

Le titre de cette interview n’est pas glorieux pour Emmanuel Macron et ne cadre pas vraiment avec les concepts macroniens de « Nouveau monde » et de « Start-up nation ! » :

Le vote Macron est celui des vieux,
des bourgeois de gauche et de droite

Voici des extraits de cette interview :

Sa parole est rare. Et son visage moins connu que le concept dont il est le théoricien : « la France périphérique », titre de l’un de ses essais phares. Cette France en voie de déclassement, écartée du processus de développement des grandes métropoles lié à la mondialisation, qui s’affranchit du projet politique des classes supérieures. Un concept désormais accepté de presque tous, depuis qu’élections et autres évènements politiques des dernières années – gilets jaunes en tête – ont démontré sa légitimité. Emmanuel Macron lui-même l’a employé, dans certains de ses discours et son livre Révolution (Xo Éditions, 2016). Sans, pourtant, rassurer cette France qui vote massivement pour Marine le Pen, comme lors du premier tour des élections présidentielles de ce 10 avril. Pour Marianne, Christophe Guilluy livre son analyse sur les résultats de ce dimanche, et sur la pratique du « barrage », qui prouve selon lui que :

« les élites n’ont plus rien en stock à proposer pour promouvoir leur modèle ».

Marianne : Jean-Luc Mélenchon est arrivé en tête dans de nombreuses métropoles (Montpellier, Rennes, Nantes, Marseille…). Quand on sait qu’Emmanuel Macron était le candidat des « métropoles mondialisées » contre la « France périphérique », cela change-t-il votre analyse sur la question ?

Christophe Guilluy

Christophe Guilluy : Il faut analyser l’électorat mélenchoniste pour comprendre. Il est à peu près le même aujourd’hui qu’il y a cinq ans, en réalité. Ses deux assises sont les classes moyennes urbaines et les classes populaires issues des minorités. C’est un vote d’attachement à la gauche, et de volonté que cette dernière survive. Le vote du réflexe, en somme, de la gauche qui ne veut pas mourir. Mais il faut voir que Mélenchon a fait un tel score en siphonnant absolument tout ce qu’il y avait à siphonner chez les autres partis de gauche. Ces 21 %, ce sont bien la gauche, mais la gauche « toute mouillée ».

Il y a eu une surmobilisation en sa faveur des professions intermédiaires, des fonctionnaires des grandes métropoles et de la petite bourgeoisie métropolitaine, certes. Mais je pense donc que c’est un chant du cygne. Car il s’agit d’une construction fragile, un alliage sociologique très complexe à tenir dans le temps, tant il repose sur la force de Mélenchon, et sur sa personnalité. Je crois qu’après lui, tout cela va voler en éclats. Car Mélenchon, malgré son hold-up sur l’électorat de gauche, se retrouve dans un corner à tenter de ressusciter la gauche, au moment où droite et gauche sont des notions dépassées. Les narratifs sur le retour de la gauche, comme celui de la droite et « l’union des droites », ne font rien vibrer dans le cœur de la majorité des gens ordinaires.

Marianne : Justement, l’électorat de droite, âgé, a déserté la droite pour devenir le socle de l’électorat Macron …

Christophe Guilluy : Le vote Macron est désormais

le vote des vieux, des bourgeois de gauche et de droite, et plus du tout d’une population « En Marche », dynamique, comme l’a vantée le logiciel macroniste.

C’est un paradoxe. C’est, en ce sens,

un vote fondamentalement conservateur. Au sens de la conservation d’intérêts de classe et d’un ordre établi.

Face à cela, il y a la contestation de la France périphérique, des classes populaires et des professions intermédiaires, mais aussi désormais maintenant de certaines métropoles, avec ce vote pour Jean-Luc Mélenchon.

Le point commun de ces contestations est toujours le même, aux accents gilet-jaunesques :

la France qui gagne moins de 2 000 euros par mois ne veut plus du modèle économique néolibéral, et veut renverser la table.

Les tentatives de remèdes proposées par le gouvernement ont donné l’impression que les révoltes avaient disparu. Mais nous assistons toujours à la révolte des premiers de cordée qu’on a encensés pendant la crise sanitaire, et des gilets jaunes. Car rien n’a disparu depuis, précisément, les gilets jaunes. Le diagnostic des gens ordinaires est solide, bétonné, et ils n’en démordront pas. En face il y a un électorat liquide, flottant, dont la stratégie électorale de marketing consiste à convaincre des segments de la société qui ont intérêt à la garantie de l’ordre établi.

Aujourd’hui, ce sont les grands bataillons de retraités, et pas du tout les forces vives de la société.

Marianne : Le même trio de tête qu’en 2017 arrive sur la ligne d’arrivée. Est-ce étonnant ?

Christophe Guilluy : Non c’est logique, car, sur le fond, rien n’a changé et n’a été fait. Tous les problèmes sont donc toujours sur la table. La seule vraie question qui vaille est : que s’est-il passé pour que la Macronie et une partie des commentateurs médiatiques aient pu nous faire croire que, finalement, le mouvement des gilets jaunes n’était pas si important, et que la contestation populaire n’existait pas vraiment ?

La France périphérique ne veut pas qu’on parle d’elle une fois par an, elle veut être au centre des représentations. Elle veut que cela se sache : « On est perdants ! Et nous ne voulons pas être à la périphérie culturelle et économique du pays, nous voulons être au centre ! ». D’ailleurs, il est intéressant de constater que les partis politiques qui n’ont pas pris en compte sa voix – LR et PS – le payent électoralement.

Marianne : Concernant la pratique du « barrage », vous avez théorisé l’ « antifascisme de classe ». L’idée que la fascisation du comportement politique des classes populaires sert à conserver l’ordre établi. Celui-ci peut-il toujours fonctionner ?

Christophe Guilluy : Il fonctionne de moins en moins, à la marge.

Et c’est tout de même très compliqué de faire campagne quand on a 100 % des médias contre soi. Si Marine Le Pen atteint 40 %, ce sera réellement un choc politique majeur.

Pourquoi ? Parce que cela signifie qu’une grande partie des Français est prête à voter avec un bulletin moralement inacceptable pour changer les choses. Que les Français sont prêts à tout pour dire qu’ils existent. Cela en dit long sur le niveau de ressentiment.

Cette pratique du barrage prouve aussi que les élites n’ont plus rien en stock à proposer pour promouvoir leur modèle. Nous allons assister à une ethnicisation de la campagne, et il sera d’ailleurs intéressant de voir ce qui va se passer dans les DOM-TOM. Si réellement c’est l’extrême droite, cela veut-il dire qu’il y aurait presque 50 % de néonazis en France ?

D’autant plus que cela se fait sur fond de défense de son petit patrimoine. Ce qui est ironique tant on fait porter aux classes populaires l’idée qu’elles seraient matérialistes, portées sur la société de consommation. Alors que la réalité, c’est que la bourgeoisie métropolitaine est dans un nihilisme consumériste complètement dépolitisée. Et que c’est le vote de classe Macron qui est un réflexe matérialiste par excellence.

Propos recueillis par Étienne Campion pour Marianne.

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3 Réponses à “Le vote Macron ? Les vieux et les bourgeois !”

  1. J’apprécie beaucoup Guilluy qui vient pourtant de la gauche, je dois avouer que son livre de 2014 la France périphérique m’a ouvert les yeux. Il est pourtant rare que je lise ce genre d’ouvrage, je suis plutôt branché Histoire. Si vous ne l’avez pas lu, je vous le conseille.

  2. Le discours de Zemmour suivait les violence montré a la TV, et collait ensemble,
    mais les merdias ont vite compris a quel point cela aidait Zemmour, et ont vite fait de ne plus montrer d’image de violence
    qui rendait le discours de Zemmour si evident et si necessaire.

    Pourquoi les merdias ont montré des images de violence et d’insecurité, probablement pour lancer Zemmour puis le couler pleinement ensuite, et definitivement, lui et ses idées…

    Comme les francais ont la memoire courte c’etait pas trop difficile.

    Par la suite, les discours de Zemmour paraissaient violent parce que plus du tout adapté a la pseudo realité montré a la TV…
    Ou les images etaient redevenue plus sereines, plus tranquilles,
    cela pour contrer petit a petit les discours de Zemmour.

    Dans un 1 er temps on lance Zemmour grace a des images sur l’insecurité et on fait croire aux gens qu’ils ont raison de le suivre,
    et dans un deuxieme temps, on ne montre plus d’image d’insecurité
    et le discours de Zemmour peut etre extremisé, puis decalé par rapport a la pseudo realité montré par les merdias.

    Ainsi, le resultat de la presidentielle sera modifié ensuite petit a petit par des sondages plus traditionnel et correspondant desormais
    a la pseudo nouvelle realité montré a la TV,
    et ainsi les gens seront a nouveau endormis par les merdias.

    Puis a nouveau beaucoup de sondages pour influencer les gens, tout ceci dans un contexte de serenité en France montré a la TV, pour mieux rouler les gens.

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