Article paru dans le numéro 4341 de Valeurs actuelles paru le 6 février :
Menacée de mort, harcelée, déscolarisée, une adolescente vit terrée chez elle depuis le 18 janvier pour avoir insulté l’islam. Un cas révélateur des aveuglements, lâchetés et impasses de notre époque.
C’est l’histoire d’une jeune fille qui, sur son compte Instagram, parle musique et maquillage. Un jeune homme devient lourd. Elle s’en plaint, il insiste, elle l’éconduit. S’ensuivent des insultes visant sa nationalité (française) et sa sexualité (elle se dit lesbienne). Mila s’emporte, dit détester « toutes les religions », insiste sur l’islam. La critique vire à l’injure : du Charlie sans les dessins.
On connaît la suite: insultes atroces, menaces de viol et de mort, publication de photos, d’adresses … Objet d’une polémique qui la dépasse, Mila, aujourd’hui déscolarisée, vit terrée, sous protection policière. Et ce qui est devenu l' »affaire » Mila est en réalité un tragique révélateur des errements de notre époque.
Il y a d’abord l’injonction ridicule à « être » Mila comme on devait « être » Charlie, avec la même ardeur à « traquer » ceux qui ne le sont pas. Une manière d’interdire la défense de Mila à quiconque ne partage pas ses vues, ses combats ou ses mots. Le danger est réel: il n’est possible de défendre que les « siens », et le communautarisme s’installe.
Il y a forcément, en face, ceux qui « ne sont pas » Mila, dont certains dénoncent fortement ses propos tout en disant trop discrètement qu’elle ne mérite tout de même pas la mort. Malaise, ainsi, en entendant le délégué général du prétendument modéré CFCM condamner machinalement les menaces tout en répétant qu’« elle l’a cherché, elle assume ».
Il y a également les progressistes déboussolés, au premier rang desquels un nombre bluffant de féministes muettes. Celles qui ont la traque au « dérapage » rodée, cette fois, se taisent, détournent le regard. Une femme est menacée par des jeunes issus de la diversité, or l’oppresseur se doit d’être un homme patriarcal occidental. Que faire ? Qui choisir ? L’antiracisme se heurte à l’antisexisme, et le progressisme se noie : au sujet de ces « questions extrêmement complexes et délicates », la porte-parole de l’association Osez le féminisme! confie que « c’est un sujet sur lequel on a choisi de ne pas se prononcer » …
Restent enfin les relativistes aveugles, qui refusent de voir ce qu’ils voient. Qui dénoncent « les religions » pour ne pas interroger l’islam, et s’accrochent abstraitement à leur « droit au blasphème » sans comprendre que les nouvelles religions de l’époque – féminisme, antiracisme, écologie, LGBT – sont, elles, intouchables.
Si l »‘affaire » Mila n’était que le cas Mila, on se contenterait de dire, face à cette situation insupportable, que la jeune femme mérite un soutien indéfectible, indépendamment de ses propos. Mila mérite-t-elle la déscolarisation pour éviter la mort ? La majorité répondra non, évidemment, mais la minorité qui répond oui est en train de gagner. En plus des agresseurs, c’est aux responsables politiques passés et présents qu’il faut demander des comptes : à force d’évoquer de grands principes sans agir pour survivre, ils ont permis à l’hydre islamiste de se glisser jusque dans les lycées. Et Mila ne va plus à l’école.
Charlotte d’Ornellas pour Valeurs actuelles.
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