Marie-Hélène Thoraval, une femme courageuse !

Publié par le 9 Mai, 2025 dans Blog | 0 commentaire

Marie-Hélène Thoraval, une femme courageuse !

Je relaye aujourd’hui une interview de la courageuse maire de Romans-sur-Isère, Marie-Hélène Thoraval, par l’Observatoire du journalisme :

Plus d’un an après le meurtre de Thomas à Crépol, la publication d’un livre-enquête vient de relancer la controverse autour de la mort du jeune homme, tué lors d’un bal de village en novembre 2023.

Truffé de contre-vérités et d’omissions, le livre a choqué jusqu’à l’Association des victimes du bal de Crépol qui dénonce aujourd’hui un travestissement de la réalité. L’Observatoire du journalisme, qui consacre un long dossier pour rétablir les faits sur le drame de Crépol, vous propose de découvrir dans son intégralité l’interview accordée par Marie-Hélène Thoraval, maire de Romans-sur-Isère.

« On me tombe dessus pour avoir eu le courage de dire les mots »

Que pensez-vous du traitement médiatique du drame de Crépol ?

La médiatisation qui s’est opérée après ce drame a été d’ampleur, probablement corrélée au niveau de violence observée ce soir-là. En revanche, là où la presse a immédiatement évoqué un « fait divers », j’ai tenu à rappeler, après les obsèques de Thomas, qu’il s’agit d’un fait de société. Aujourd’hui, l’actualité me donne malheureusement raison.

Quant au « livre-enquête », j’insiste sur les guillemets, réalisé par Jean-Michel Décugis, Marc Leplongeon et Pauline Guéna, il ne correspond en rien à la réalité de l’échange que j’ai eu avec Jean-Michel Décugis. Je l’ai reçu car il m’avait été recommandé par un préfet que je connaissais. Je l’ai donc reçu en toute confiance alors même que, vous pensez bien, je n’ai pas toujours répondu favorablement aux demandes des journalistes. Je suis maire avant tout, je ne suis pas là pour faire de la communication.

Quand j’ai découvert ensuite les bonnes feuilles du livre et ce qui a été retenu de notre échange, je peux vous assurer que c’était la stupéfaction pour moi. Entre la personne que j’ai rencontrée le 19 décembre 2023 et celle qui s’est exprimée dans le cadre de la promotion de cet ouvrage, il y a un vide abyssal. Quand je l’ai reçu, j’ai pourtant répondu avec honnêteté à l’intégralité de ces questions. À chaque fois que j’ai avancé une idée, je l’ai toujours justifiée. Mais les auteurs n’ont pas jugé nécessaire de reprendre les explications que j’ai données. Le livre travesti totalement mes propos.

Avez-vous souhaité ou eu un contact avec les auteurs du livre après sa parution pour vous expliquer ?

Aucun. Et je n’y tiens absolument pas. Le mal est fait.

Comment interprétez-vous ce besoin impérieux des journalistes de minimiser le drame ?

Je vous dirais d’abord que c’est dramatique de vouloir travestir la réalité de la violence qui s’est opérée ce soir-là. C’est vouloir minimiser et surtout banaliser une violence qui devient in fine une violence ordinaire. C’est une manière de ne pas accepter la réalité et, surtout, de ne pas vouloir constater que nous avons une problématique en termes d’immigration, de comportements, de politique d’intégration et d’assimilation. En faisant cela, les journalistes refusent d’admettre que des quartiers autrefois populaires sont devenus des quartiers communautaires.

Quand, par exemple, j’explique à Jean-Michel Décujis que le quartier de la Monnaie est un point noir pour nous, c’est parce qu’une majorité de la population de ce quartier aspire à vivre paisiblement. Mais aujourd’hui, les politiques menées par nos gouvernants ne nous permettent pas d’avoir une réponse aux situations que l’on rencontre dans ces quartiers. Ces quartiers sont devenus des zones de non-droits et de narco-trafic. Et, je le maintiens, certains de ces quartiers sont aujourd’hui sous l’emprise d’une forme d’islamisme radical.

De la même manière, ce que je trouve particulièrement scandaleux dans leur propos, c’est de banaliser le fait d’être muni d’un couteau « pour couper du shit ». Comment peut-on écrire des trucs pareils ? Quand vous avez un couteau, avec une lame de 25 centimètres, je suis navrée mais on ne peut pas dire que vous êtes équipé d’un couteau. Vous êtes armé d’un couteau. Si vous n’êtes pas capable de le constater et de pouvoir regarder cela avec toute l’objectivité nécessaire, c’est que vous travestissez la réalité.

C’est un manque total de considération pour leurs lecteurs et une « banalisation » blessante pour ceux qui ont vécu le drame. Et encore, le mot est faible.

Selon les journalistes, le drame de Crépol est avant tout symptomatique d’un conflit entre urbains et ruraux…

On ne saurait opposer les urbains et les ruraux, cela n’a rien à voir. Ils n’ont rien compris à notre territoire et ne l’ont pas ressenti. Nous vivons ensemble. Les jeunes qui habitent en milieu rural sont au lycée dans nos villes. L’opposition qui est faite est une caricature particulièrement blessante et humiliante. De quel droit se permettent-ils d’humilier et de blesser les gens de cette manière ?

Dans leur ouvrage, les trois auteurs vous accusent d’avoir « mis de l’huile sur le feu » pour avoir qualifié le meurtre de Thomas de « fait de société et non de fait divers » et, surtout, pour avoir, la première, demandé que le mobile raciste anti-Blanc soit considéré par la justice. Que leur répondez-vous ?

C’est précisément une chose que je souhaite vraiment rajouter : pourquoi je dénonce cela ? Parce que, dans ces quartiers, vit une majorité de personnes qui aspirent à vivre paisiblement. En ce qui concerne mon territoire, la majorité des personnes qui travaillent tous les jours vivent, par exemple, dans l’angoisse de retrouver leur voiture le lendemain matin quand d’autres sont obligées d’organiser leur journée pour faire leurs courses aux heures où elles seront sûres de ne pas être ennuyées. Est-ce que cela est normal ?

Avez-vous le sentiment que l’auteur du livre savait déjà ce qu’il allait écrire avant même de vous rencontrer ?

Ah oui. Je pense qu’ils n’avaient même pas besoin de venir me voir. Je me demande même s’ils ont passé plus de 24 heures sur place pour écrire des choses pareilles.

Les journalistes ont-ils pris contact avec des membres de la famille de Thomas ou de l’Association des victimes du bal de Crépol au moment de leur enquête ?

Je ne sais pas. En revanche, je ne vous dis pas dans quel état ils étaient après la sortie du livre. Lisez d’ailleurs ce qu’ils ont écrit sur les réseaux sociaux. Les journalistes ne les ont pas traités de gueux mais ils n’en étaient pas loin. Ils ont parlé de gens « taiseux » et « austères » sans même les connaître. La description qui en est faite ne reflète en rien la mentalité qui est celle des gens de notre territoire. Les journalistes les ont catalogués comme cela les intéressait ! C’est dramatique. Je rappelle tout de même qu’il y a eu un mort, des blessés et des victimes qui sont traumatisées à vie.

Les parents de Thomas, comme les membres de l’association des victimes, ont également été choqués par la révélation d’éléments de l’enquête. Je rappelle là aussi que l’enquête est toujours en cours. Où est le secret de l’instruction ? C’est tout de même grave.

Le mardi 28 novembre 2023, au micro de BFMTV, vous avez demandé que « le caractère raciste » soit retenu dans le meurtre de Thomas. La presse vous a dès lors accusé de relancer une thèse raciste qui n’avait aucun fondement. Pourquoi avoir demandé cela à la justice ?

J’ai toujours dit que je n’étais pas là pour défendre ce point-là en mon nom propre mais que j’exprimais le souhait des familles de considérer le motif de « racisme anti-Blanc ». Voilà ce que j’ai dit. Les familles l’ont d’ailleurs aussi exprimé auprès d’Olivier Véran lorsqu’il s’est rendu sur le terrain.

J’ai en revanche, c’est vrai, été la première à marteler que le meurtre de Thomas était un fait de société. On me tombe dessus pour avoir eu le courage de dire les mots. En libérant la parole à ce sujet, j’ai, je crois, permis de lever certains tabous. J’en veux pour preuve les récentes déclarations du ministre de l’Intérieur ou de Fabien Roussel qui ont récemment reconnu l’existence du racisme anti-Blanc.

Si on ne veut pas voir la réalité telle qu’elle est, jamais les bonnes politiques ne pourront être mises en place.

Depuis vos déclarations, certains médias d’extrême-gauche tels que StreetPress ou encore Blast vous accusent d’être « d’extrême droite » et d’exacerber les tensions au rythme de « fakes news ». Que leur répondez-vous ?

Moi je suis maire avant tout. À partir du moment où vous décrivez une réalité qui dérange, que l’on a pas envie de voir, on vous met une étiquette politique sur le front pour essayer de vous faire taire, minimiser vos propos ou d’en extraire toute la substance.

Vous savez, ils peuvent toujours continuer, cela ne changera rien pour moi. Je n’ai pas besoin d’étiquette politique pour décrire ce qu’il se passe et ce qu’est la réalité du quotidien. Et je ne parle pas seulement de mon territoire. On me reproche en réalité d’avoir eu le courage de dire ce qu’il se passe. Mais dans les faits, les vrais gens, ceux qui vivent dans nos territoires, me remercient. Je dois aujourd’hui être à plus de 5000 mails et courriers reçus pour m’encourager et me remercier !  Et dans ces courriers, voilà ce que les gens m’écrivent :

Enfin, vous au moins, vous dites ce qu’est notre quotidien.

Propos recueillis par Lorelei Bancharel pour l’Observatoire du journalisme.

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