Et si on laissait la science chasser l’idéologie …

Publié par le 24 Juin, 2018 dans Blog | 0 commentaire

Et si on laissait la science chasser l’idéologie …

Oui, tu avais bien raison, Najat !

On se souvient de la terrible grimace de Najat Vallaud-Belkacem à l’annonce du nom de son remplacement à la tête du ministère de de l’Education nationale : Jean-Michel Blanquer.

Elle avait alors compris, en une seconde, que tout ce qu’elle avait fait à la tête de son ministère allait être rayé d’un trait de plume …

… et que tout ce qu’elle avait déconstruit (le latin, le grec, les classes bi-langues, etc …) au nom d’un égalitarisme forcené et imbécile, allait être « reconstruit » !

Jean-Michel Blanquer est un ministre pragmatique qui doit remettre sur pied une école détruite par quarante années de pédagogisme piloté par de la pure idéologie gauchiste.

Bonne chance à lui ! Il est haï par tous ces pédagogues qui, comme Najat, ont compris ce qui allait advenir de leur « oeuvre ». Jean-Michel Blanquer vient de les provoquer en offrant les Fables de La Fontaine aux 800 000 enfants sortant cette année de CM2. Rendez-vous compte : offrir un auteur classique à des enfants qu’on forme en les faisant lire des notices de machine à laver, parait-il ! Lire à ce sujet l’excellent article de Jean-Paul Brighelli paru dans Causeur : Blanquer, La Fontaine et moi (et moi et moi …)

Pour changer un peu, je vous propose deux articles trouvés dans un récent numéro de Sciences et Avenir  dédié aux capacités du cerveau. Le premier présente l’apport des sciences cognitives dans le domaine de l’Education, le second une interview de Jean-Michel Blanquer sur le même sujet.

Voici donc le premier de ces articles :

Les sciences cognitives à l’école

De nombreuses expériences à l’école primaire, au collège ou au lycée s’inspirent des dernières connaissances sur le fonctionnement du cerveau pour mettre en oeuvre d’autres pédagogies.

ECOLE FRANÇOIS-CÉSARI, à Septèmes-les-Vallons (Bouches-du-Rhône), après une courte séance de relaxation matinale, les élèves de CE2 sortent leurs« plickers », des plaquettes portant une figure orientable. L’enseignante pose une question et aussitôt les enfants brandissent cette ardoise high-tech, orientée selon leur choix parmi quatre réponses possibles. Smartphone en main, l’enseignante scanne alors les plickers, prenant ainsi instantanément connaissance des éventuelles erreurs commises. Un avantage, car plus la correction est rapide, plus l’apprentissage est efficace !

Bienvenue dans une « cogni’classe », qui s’inspire des sciences du cerveau pour mettre en oeuvre de nouvelles pratiques pédagogiques. « Notre objectif est de former les enseignants et de lancer des expérimentations, explique Jean-Luc Berthier, ancien proviseur, spécialiste des neurosciences cognitives et créateur du concept cogni’classe en 2013. Nous en avons aujourd’hui 250 en France, du primaire jusqu’aux classes préparatoires. » Après avoir suivi une formation par le biais de conférences ou d’un MOOC (cours en ligne), les professeurs volontaires peuvent lancer leur projet au sein d’une équipe pédagogique. Ainsi, en région Paca, 18 classes de CE2 tentent l’expérience depuis septembre 2017, coordonnée par l’inspectrice de l’Éducation nationale. Elles seront évaluées pendant trois ans.

L’initiative pionnière rejoint la vision de Stanislas Dehaene, neuroscientifique, professeur au Collège de France, nommé en début d’année par le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, à la tête du nouveau Conseil scientifique de l’éducation nationale (CSEN) : « Les sciences cognitives ont identifié quatre facteurs principaux de réussite d’un apprentissage, expose le spécialiste : l’attention, l’engagement actif, le retour d’information et enfin, la consolidation. »

Pour solliciter l’attention, la cogni’classe propose des séquences de « mise au calme des esprits », composées de petits exercices.

Pour stimuler l’« engagement actif » des élèves – gage de leur apprentissage – , Caroline Victor, professeure de sciences de la vie et de la Terre au lycée Robert-Schuman à Charenton (Val-de-Marne), utilise des « flashcards » dans sa cogni’classe. « Il s’agit de fiches de questions-réponses conçues par les élèves, explique-telle. Ils les tirent au sort et s’interrogent les uns les autres. »

Les cogni’classes mettent également l’accent sur la consolidation des savoirs. « La mémorisation est l’immense point faible de l’enseignement, constate Jean-Luc Berthier, il faut donc la travailler en classe. » Cela passe d’abord par la compréhension. « À durée d’exposition constante, les mêmes mots seront mieux retenus s’ils font l’objet d’un traitement sémantique profond », énonce Stanislas Dehaene. Relire passivement sa leçon est donc bien moins efficace que de s’interroger à son propos ou d’en parler à quelqu’un d’autre. En outre, le chercheur rappelle que l’hippocampe cérébral – cet organe impliqué dans la mémorisation étant fortement activé pendant le sommeil, il faut veiller à la qualité de ce dernier. Enfin, la clé de voûte de la consolidation, c’est la répétition. Selon le neuroscientifique, lors de tout nouvel apprentissage, le cerveau a recours à un traitement« explicite » (conscient) géré par le cortex préfrontal, attentif à l’objet à retenir. Pour que ce savoir explicite soit ensuite transféré vers l’implicite (non conscient) et y rester gravé, il faut réviser les notions à intervalles réguliers. « Dans les cogni’classes on construit ainsi des plans de révision rigoureux étalés sur plusieurs mois », expose Jean-Luc Berthier. Ce planning pouvant être confié à un logiciel qui propose des fiches de révision personnalisées.

Si l’automatisation par la pratique est au coeur de l’apprentissage cognitif, l’inverse est aussi vrai. « Le cerveau d’un élève doit aussi apprendre à inhiber ses automatismes, explique Olivier Houdé, ancien instituteur et directeur du Laboratoire de psychologie du développement et de l’éducation de l’enfant de l’université Paris-Descartes (LaPsyDÉ). Cette flexibilité cognitive correspondant à la capacité d’explorer d’autres chemins de pensée. » Car le fait est que le cerveau de l’enfant peut avoir automatisé des théories qu’il faut parfois savoir remettre en question. Exemple avec cet exercice comprenant deux rangées de même longueur comptant le même nombre de  jetons. « Jusqu’à 7 ans environ, l’enfant considère automatiquement que le nombre de jetons est le même, car pour eux « nombre= longueur » », affirme Olivier Houdé … En revanche, si l’on espace les jetons d’une des rangées, l’enfant considère que la rangée la plus longue compte davantage de jetons. Ce n’est qu’à partir de 8 ans que les enfants déjouent le biais. « Notre étude en IRM fonctionnelle a montré que pour donner la bonne réponse, les enfants doivent inhiber leur automatisme (nombre= longueur) pour se mettre à compter.  » Les enseignants peuvent ainsi enseigner cette inhibition aux enfants par des petits jeux.

Faire aussi appel aux sciences du comportement 

Convaincu que les neurosciences peuvent apporter de vraies connaissances sur les enfants, Olivier Houdé, qui a fondé le réseau LEA pour diffuser les savoirs pédagogiques, a cependant refusé d’intégrer le CSEN. « Je n’ai pas voulu participer à un processus qui laissait le sentiment aux professeurs qu’on allait leur imposer les neurosciences », affirme-t-il. Une inquiétude partagée par certains enseignants du Snuipp (principal syndicat de l’école primaire), signataires d’un appel pour que le ministère soutienne « toute » la recherche et pas uniquement les neurosciences. « Les résultats récents dans cette discipline ne bouleversent pas ce que les enseignants expérimentés savent déjà, assure ainsi l’un des signataires, Roland Goigoux, professeur des universités et spécialiste de l’enseignement de la lecture. Passer du laboratoire à la classe nécessite de faire appel aussi aux sciences du comportement (psychologie cognitive, sociologie). Il y a un monde entre la science et les décisions à prendre en classe. »

Alors les cogni’classes, école du futur ?

Elena Sender pour Sciences et Avenir.

A suivre : l’interview de Jean-Michel Blanquer.

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