Des 35 heures à la gestion calamiteuse du coronavirus …

Publié par le 10 Déc, 2020 dans Blog | 0 commentaire

Des 35 heures à la gestion calamiteuse du coronavirus …

« Le décrochage économique spectaculaire de notre pays par rapport à ses voisins ne relève pas de bourdes regrettables mais d’une incapacité systémique de nos élites depuis vingt ans à comprendre le monde …

… qui appelle à un changement de régime. »

C’est le réquisitoire sans appel que l’économiste Christian Saint-Etienne vient de publier dans Valeurs actuelles.

On ne parle que de l’aspect sanitaire de la pandémie et relativement peu de ses conséquences économiques car pour l’instant l’économie française est sous perfusion de l’Etat. Mais pour combien de temps encore ?

Voici la suite de l’article de Christian Saint-Etienne :

La France face à la Covid : les Pieds nickelés

La performance de la France et de ses autorités publiques face à la Covid est calamiteuse : un recul de l’activité deux fois plus important en France qu’en Allemagne, et un nombre de morts par million d’habitants deux fois plus élevé en France qu’en Allemagne. Ce n’est pas tout. La désindustrialisation massive en France depuis vingt ans a conduit à un poids de l’industrie en proportion du PIB en France moitié moindre qu’en Allemagne. ll en résulte un déficit de la balance courante qui devrait atteindre 3 % du PIB en France en 2020 contre un excédent allemand de 6 % du PIB. La dette publique atteindra 120 % du PIB fin 2020 en France contre 70 % en Allemagne. Depuis 1999, nous avons perdu plus de 40 % de nos parts de marché à l’international. En 2020, nous continuons de reculer et notre déficit commercial va fortement s’aggraver.

Il convient donc d’expliquer deux ruptures : la glissade de notre économie depuis vingt ans et la descente d’une grosse marche d’escalier en 2020.

Le point de départ de la première, c’est évidemment la mise en oeuvre des 35 heures en 1999-2000. Mais il ne faut pas confondre la cause première et la cause apparente. La cause première se trouve dans la vision radicalement fausse de l’ensemble de nos élites – politiques,
économiques, médiatiques – selon laquelle nous passions dans les années 1990 du monde industriel au monde post-industriel. En réalité, nous passions de la deuxième à la troisième révolution industrielle, cette dernière, dont la technologie mère est l’informatique, exigeant des
investissements massifs en informatique, robotique, logistique, numérique, qui n’ont pas été faits ou trop peu. La fausse idée du post-industriel a conduit des pseudo-élites, incapables de comprendre le monde ou de modifier une trajectoire erronée, à anticiper la « fin du travail » et à concevoir les 35 heures pour partager la “fin du travail » ! Tout était faux du début à la fin mais cette fausse analyse perdure. Au lieu d’investir massivement dans les nouvelles technologies, nous avons fermé des usines, ce qui a préparé le mouvement des “gilets jaunes », ces anciens ouvriers des usines fermées et des territoires alors désertés.

La seconde rupture résulte de l’incapacité sidérante de la sphère publique à faire face aux mutations et risques du monde actuel. La sphère publique a réussi l’exploit de combiner le record du monde de la dépense publique en 2019 – 56 % du PIB – avec l’absence de masques et de tests au début de la pandémie. ll fallut attendre le mois d’avril 2020 pour qu’interviennent les premières commandes massives de masques et de tests, après avoir osé dire qu’ils étaient inutiles. Le gouvernement a réussi à combiner impéritie et mensonge. Mais ce n’est pas tout.En ne relançant pas l’économie le 20 avril 2020 comme l’Allemagne et les pays du Nord, mais le 11 mai, les autorités ont contribué à un nouveau décrochage de l’industrie car la consommation continuant, les importations ont fortement augmenté. Au fond, le président et ses deux Premiers ministres successifs considèrent l’économie comme de la mécanique, ainsi qu’on l’apprend à Sciences Po et à l’Ena : on peut tout arrêter en appuyant sur un bouton et tout faire repartir en réappuyant sans que rien dautre n’ait changé. Quelle est l’erreur centrale ?

L’économie n’est pas de la mécanique mais de la biologie : quand on coupe un bras, il ne repousse pas. Et la même erreur est commise en octobre-novembre 2020 quand on réinstaure le confinement, contrairement à l’Allemagne, provoquant la destruction d’une part significative du tissu économique qui manquera lors de la reprise en 202. Il fallait plutôt durcir le couvre-feu et lutter contre la transmission dans la sphère privée, qui est devenue la principale source de circulation du virus.

Une telle série d’erreurs depuis les années 1990, sur la mutation d’une révolution industrielle à l’autre et sur la nature biologique de l’économie, ne relève pas de bourdes regrettables mais d’une incapacité systémique à comprendre le monde, qui appelle à un changement de régime. Pas pour quitter l’Union européenne et se replier dans le monde rural, mais pour investir massivement dans les infrastructures et l’industrie, réduire les impots de production, controler les frontières pour que n’entrent que les travailleurs qualfiés, assurer à nouveau la sécurité sur le territoire, rénover totalement notre appareil militaire dans un monde de plus en plus dangereux et utiliser nos métropoles comme des divisions de combat dans la globalite. La dépense de protection sociale doit être strictement contrôlé, tandis que leffort d’éducation, de formation et de recherche et développement doit augmenter.

Plutôt que d’attendre l’arrivée hypothétique de « l’homme providentel », il faut commencer par dire la vérité au peuple.

Christian Saint-Etienne pour le Club de Valeurs actuelles.

* Christian Saint-Etienne est universitaire, économiste.
Dernier ourage paru : « le Libéralisme stratège contre le chaos du monde » (Odile Jacob).

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