France, ta justice fout le camp !

Publié par le 16 Sep, 2020 dans Blog | 0 commentaire

France, ta justice fout le camp !

En juillet dernier, un énorme scandale politico-judiciaire était révélé par le magazine Le Point.

Le Parquet national Financier, déjà largement mis en cause dans sa gestion plus que partisane de l’affaire Fillon, se retrouve encore au coeur de ce scandale pour avoir surveillé les téléphones de plusieurs avocats de renom du Barreau de Paris, dont Eric Dupont-Moretti.

Voila ce qu’avait déclaré, sur le coup, Eric Dupont-Moretti :

Je découvre avec stupéfaction des méthodes que je qualifie de barbouzades, je pèse mes mots. Thierry Herzog est mon ami, je l’appelle toutes les semaines .

On va surveiller pendant 15 jours mes facturations détaillées, pour savoir qui j’appelle, de qui je reçois des appels. Cela viole à la fois l’intimité de ma vie privée, cela viole mon secret professionnel et le secret de mes correspondances.

Et il poursuit :

Il est vraiment temps que l’on prenne un certain nombre de décisions. L’indépendance des juges, c’est bien joli. Mais cela n’a de sens que si cela s’accompagne de l’impartialité du juge.

Il faut vraiment qu’un beau jour on donne un grand coup de pied dans la fourmilière. On a basculé dans la République du juge. C’est un immense danger pour la démocratie. Quand les dictatures arrivent, les premiers qu’on touche, ce sont les journalistes et les avocats.

L’avocat de Maitre Philippe Herzog n’a pas non plus caché son indignation :

L’ampleur des investigations pour trouver la “taupe” supposée montre l’aspect désespéré de la procédure, on va chercher jusqu’au bout du monde des preuves qui n’existent pas, tout ça pour déboucher sur un constat d’échec et le cacher à la défense !

A la suite de plaintes déposées par Eric Dupond-Moretti-Moretti et ses confrères, une enquête avait été confié à l’Inspection judiciaire. Mais voila, entre temps, un événement est venu rebattre les cartes :

Eric Dupond-Moretti-Moretti a été nommé Garde des Sceaux !

Ce dernier a retiré sa plainte « pour ne pas être juge et partie » mais on pouvait légitimement douter de l’aboutissement de l’enquête contre le Parquet National Financier.

Et ça n’a pas manqué !

Voici un article du Point dont le titre est explicite :

Enquête parallèle du PNF : l’inspection judiciaire botte en touche

Ceux qui s’attendaient à ce que l’Inspection générale de la justice (IGJ) « explose » le PNF en seront pour leurs frais. Son rapport, communiqué en début de semaine au ministre de la Justice, que nous avons pu consulter, fait suite aux révélations du Point sur les investigations parallèles pratiquées durant plusieurs années dans l’affaire Bismuth, en marge de l’instruction et sous couvert d’une enquête préliminaire menée dans le plus grand secret.

Écrit par des magistrats, ce rapport d’inspection noie le poisson sous des considérations essentiellement techniques et juridiques, au risque de donner le sentiment de couvrir les agissements du PNF.

Précisons que Mme Éliane Houlette, qui dirigeait ce parquet spécialisé au moment des faits, a refusé d’être auditionnée par les inspecteurs.

« Clair et factuel »

« Les nécessités d’enquête ayant justifié ces investigations sont précisées par des PV clairs et factuels », écrivent ainsi les membres de la mission d’inspection. « La rédaction des PV de réception et d’exploitation des données collectées atteste du souci des enquêteurs de ne pas exposer excessivement la vie privée ou le secret professionnel des titulaires des lignes exploitées. N’ont ainsi été retranscrits de façon nominative que les renseignements susceptibles d’éclairer les investigations. Les dispositions du Code de procédure pénale relatives aux réquisitions adressées aux opérateurs de téléphonie ne prévoient aucune protection liée à l’exercice de la profession d’avocat », poursuivent-ils. En clair, rien d’illégal ni de répréhensible, selon les inspecteurs.

Une critique voilée apparaît bien au fil des pages, mais en des termes extrêmement policés : « À l’occasion de ses investigations sur le traitement de cette enquête, la mission [de l’Inspection] a relevé le besoin d’adaptation de l’environnement de travail du PNF. Elle estime également nécessaire de faire évoluer sa gouvernance et son organisation, de mieux formaliser les règles de fonctionnement et de renforcer les procédures de contrôle interne. » Difficile de faire plus sobre. L’Inspection se veut d’ailleurs rassurante : le nouveau patron du PNF a « indiqué à la mission être particulièrement attentif à la nécessité de prendre en compte ces enjeux d’évolution, pour donner un nouveau souffle à ce parquet encore jeune, ayant acquis une légitimité institutionnelle. Il conviendra qu’il soit accompagné par l’administration centrale. »

Dans ce rapport volumineux, l’Inspection formule « 19 recommandations visant à améliorer le fonctionnement du PNF » : « prévoir un dialogue de gestion adapté », « procéder à un état des lieux du recours aux copies de travail des données », « évaluer, organiser et contrôler […] le cadre et les modalités de communication des informations et données à caractère personnel », « faire procéder aux adaptations nécessaires [du] système informatique », « formaliser le circuit d’enregistrement des circuits de procédure », etc. Pour finir, le procureur de la République financier est invité à « associer l’ensemble des membres de son parquet à l’élaboration d’un projet de service développant une vision stratégique de son action ».

Fadettes épluchées, avocats géolocalisés

L’IGJ avait été saisie le 1er juillet 2020 par la garde des Sceaux de l’époque, Nicole Belloubet. La ministre avait découvert, dans Le Point, certaines pratiques du PNF qui, à compter de 2014 et jusqu’à fin 2019, durant plus de cinq ans donc, sans en référer à personne, avait organisé un montage judiciaire extrêmement complexe visant à identifier une taupe qui aurait pu renseigner Nicolas Sarkozy et son avocat, Me Thierry Herzog, de leur placement sur écoutes, dans la procédure ouverte contre eux. Il n’a pas lésiné sur les moyens. Sans soupçons avérés, les factures de téléphone détaillées (fadettes) des cabinets d’avocats Dupond-Moretti, Temime, Lussan, Canu-Bernard, Haïk ou encore Veil-Jourde – étrangers à la procédure – ont été épluchées ; quelques-uns de ces pénalistes, parmi les plus renommés de France, ont même été géolocalisés.

Les enquêteurs ont obtenu ainsi, sur une longue période, la liste de tous les appels entrants et sortants des numéros reliés au standard du Parquet national financier, avant qu’une juge d’instruction parisienne ne subisse le même sort.

Mieux encore, ou plutôt pire : alors que les investigations se sont vite dirigées vers un classement sans suite – aucune taupe n’avait été identifiée en mars 2016 –, les résultats ont été volontairement tus par le PNF ; ils constituaient des éléments à décharge susceptibles de servir la défense de Nicolas Sarkozy, poursuivi pour corruption et trafic d’influence dans l’affaire Paul Bismuth.

Pendant toutes ces années, cette enquête a donc été menée en secret, dans un cadre procédural trouble, de manière à ce que nul autre que les procureurs qui en avaient la charge ne puisse en avoir connaissance.

Lettre de mission

Dans sa lettre de mission du 1er juillet, Mme Belloubet demandait aux services de l’Inspection de déterminer l’étendue de ces investigations, leur durée et leur « proportionnalité » au regard des dispositions du Code de procédure pénale ; de préciser le « support procédural utilisé » et notamment son « articulation » avec l’information judiciaire menée par les juges d’instruction ; « la nature et les modalités de contrôle » de l’enquête ; l’utilisation faite des informations ainsi collectées et « les modalités » selon lesquelles il en a été rendu compte (ou pas). « Vous analyserez l’ensemble des faits et indiquerez si des dysfonctionnements ou des manquements peuvent être constatés dans le processus procédural, l’organisation ou les méthodes choisies. Vous procéderez à toutes investigations utiles relatives à l’organisation et à l’activité du Parquet national financier, dans cette affaire », ordonnait encore Nicole Belloubet.

Nicolas Bastuck, Marc Leplongeon pour Le Point.

La conclusion est terrifiante : en France, une instance judiciaire, voire politico-judiciaire, créée par le pouvoir socialiste contre ses adversaires de droite, a pu tuer la candidature de François Fillon, écouter des conversations entre Nicolas Sarkozy et son avocat ainsi qu’espionner pendant des mois les téléphones de plusieurs ténors du barreau de Paris, en toute impunité.

Vous avez dit : République bananière ? Oui, France, ta justice fout le camp !

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