Ne vous laissez pas enfumer !
Selon les médias, mais aussi dans les propres rangs des Républicains, on entend pis que pendre sur Laurent Wauquiez.
J’ai entendu l’autre matin, sur RTL, Jean-Christophe Lagarde, ce président de l’UDI qui brille surtout par son manque de charisme, se livrer à une violente critique contre le nouveau président des Républicains. Selon lui, l’UDI et les Républicains ne partageraient plus les mêmes valeurs !
Selon tous ses ennemis :
- Laurent Wauquiez serait radicalisé,
- Laurent Wauquiez monterait les Français les uns contre les autres,
- Laurent Wauquiez labourerait les terres de l’extrême droite,
- Laurent Wauquiez s’apprêterait même à pactiser avec le Font national,
- Laurent Wauquiez, pire que tout, serait un anti-européen convaincu.
L’intéressé a beau répéter sur tous les tons qu’il ne fera jamais d’accord avec le FN, le point Godwin * lui est appliqué en permanence, Marine Le Pen se substituant alors à Adolf Hitler !
Pour reprendre uniquement le dernier point des reproches faits à Laurent Wauquiez, je me propose, ce matin, de résumer un entretien qu’il a donné à six grands quotidiens de la presse européennes. Un lien vers le texte intégral de l’entretien est donné en fin d’article
Les Républicains à l’opposé de Macron
L’Europe de Macron est fédéraliste, technocratique. Il veut créer douze nouvelles institutions européennes et quatre nouvelles taxes. C’est une fuite en avant avec l’élargissement aux Balkans et l’extension de Schengen à la Roumanie et la Bulgarie. Il propose toujours plus de ce qui ne marche pas depuis trente ans. Nous proposons le retour à une Europe pragmatique et de bon sens.
Les priorités des Républicains pour l’Europe
- Arrêter toute fuite en avant au niveau des institutions et de l’élargissement,
- Stopper l’hydre normalisatrice, ce flux continu de normes,
- Faire l’Europe sur des projets concrets. C’était un principe fondateur mais il s’est perdu. Nous devons envisager que l’Europe puisse être maitre d’oeuvre dans des grands projets :
- Réalisation de grandes infrastructures comme le Lyon-Turin,
- Couverture haut débit Internet de l’ensemble du territoire européen,
- Recherche pour le vaccin contre l’Alzheimer ou de nouveaux remèdes contre le cancer.
Quid de l’immigration en Europe ?
Je ne crois pas à la politique menée actuellement en Europe concernant l’immigration. Je constate que ça ne marche pas. Il y a d’énormes différences d’approche. L’Allemagne, avec un taux de chômage de 4% et une démographie zéro, a des besoins d’immigration. La France, avec un taux de chômage supérieur à 20% chez les jeunes et une démographie dynamique, n’a pas les mêmes capacités d’intégration.
Il faut continuer à défendre ensemble les frontières européennes mais quand un migrant est passé par l’une de ces frontières, il ne doit pas pouvoir circuler librement.
Refonder Schengen ?
Plutôt une refondation radicale. Trop souvent dans le domaine européen, on est dans le tout au rien. Soit on est pour l’Europe, et on est pour la fuite en avant. Soit on est contre, et on est un méchant populiste. Il doit y avoir une autre voie. Si vous voyagez entre Paris et Londres il n’y a pas d’énormes difficultés. Le Royaume Uni n’est pas dans Schengen mais nous avons des accords pour gérer les déplacements. Ce que je souhaite c’est que les pays européens puissent retrouver une maitrise de leur politique migratoire. Je ne peux pas accepter que quand un Etat membre décide de régulariser des irréguliers cette décision affecte tous les autres Etats.
Quelle vision de l’Europe ?
Ce n’est pas une vision technocratique. L’Europe, c’est une culture, c’est une civilisation. C’est un mode de vie que nous devons préserver. Trop souvent, ce n’est pas le cas.
Une Europe en trois cercles …
Dans la théorie des cercles que j’ai en tête, je considère qu’il y a trois cercles. Le premier cercle est un cercle étroit qui correspond aux pays fondateurs historiques.
J’ai toujours dit que je voulais laisser une marge de manoeuvre de six à douze. Je suis historien et quand on se place dans une perspective historique, on voit bien qu’il y a une rupture au début des années 90, quand on commence à franchir un certain seuil dans le nombre d’adhésions. Six à douze, c’est un bon chiffre, avec un équilibre, et j’y tiens beaucoup, entre l’Europe du Nord et l’Europe du Sud. Je ne conçois évidemment pas que dans ce noyau dur on n’ait pas l’Espagne, le Portugal, l’Italie.
Le deuxième cercle, c’est celui de la zone euro. C’est un cercle dans lequel l’objectif, puisque que c’est le bien principal qu’on a en partage, c’est de faire en sorte que la monnaie marche.
Le troisième cercle doit être un cercle dans lequel on autorise une association plus souple, à la carte. Il faut être capable de faire un régime sur mesure pour le Royaume-Uni. Le Brexit doit nous conduire à réfléchir à ce qu’il faut revoir dans le fonctionnement de l’UE.
Nous sommes dans une époque où on n’a jamais eu autant besoin d’Europe, et en même temps le projet européen n’a jamais suscité autant d’interrogations. C’est un contraste terrifiant. Au départ, on a affaire à un projet légitime et fondé. Mais en l’espace de 30 ans, un gouffre immense s’est creusé avec l’opinion publique. Et on voudrait tout continuer comme avant ? Parfois quand on écoute le discours d’Emmanuel Macron, on entend qu’on est au bord du précipice, et qu’il faut faire un pas en avant !
L’Europe a t-elle des racines chrétiennes ?
Il y a trois racines dans notre civilisation :
- La racine gréco-latine.
- La racine judéo-chrétienne.
- Et l’héritage des Lumières et de la Révolution.
Ces trois racines constituent la singularité de l’humanisme européen. Est-ce que l’Europe a compris qu’elle était autre chose qu’une construction technocratique ? Que sa vocation était de défendre une voie singulière d’équilibre dans la mondialisation ?
C’est la philosophie d’Emmanuel Macron !
Oui, sauf que le progrès selon Emmanuel Macron, c’est une fuite en avant dans le fédéralisme européen. Emmanuel Macron, c’est toujours plus de ce qui n’a pas marché depuis 30 ans. Moi je veux qu’on ouvre les yeux. Qu’on observe que quelque chose s’est rompu dans le rapport entre l’Europe et les Européens. Et qu’on ait le courage de tout revoir, tout en gardant l’ambition initiale. Tout refonder pour tout sauver.
La laïcité à la française ne peut-elle être exportée au niveau européen ?
Sûrement pas. J’étais à Bruxelles il y a quelques jours où j’ai une partie de ma famille. Quand vous allez sur la Grand-Place, personne ne songe à s’offusquer du fait qu’il y ait une crèche .. Il y a eu une polémique. Mais toujours est-il que cette crèche est là. En France si vous installez une crèche, vous avez un recours en justice.
Je veux montrer que nous avons une identité. L’ouverture à l’autre ne repose pas sur le fait de renoncer à soi. C’est une profonde erreur de croire que l’on va intégrer les musulmans chez nous parce qu’on oubliera qu’on a des racines chrétiennes. Je suis allé au musée des Beaux-Arts à Bruxelles. Qui peut comprendre un tableau de Bruegel, de Rubens, si on oublie d’où on vient ? Qui peut comprendre tout ce que nous sommes si on ne transmet plus notre histoire judéo-chrétienne ? On est aujourd’hui dans une rupture historique avec des flux d’immigration massifs qui posent des difficultés d’intégration qui potentiellement peuvent emporter nos pays, si nous ne sommes pas capables de gérer l’intégration.
La loi de 1905 représente un équilibre parfait pour la France. Le problème c’est qu’il est aujourd’hui altéré et que l’on s’aveugle sur ce qui l’altère. Je suis parfois décontenancé quand je vois que certains dans mon pays considèrent que l’ennemi de la laïcité serait une croix sur une statue de Jean-Paul II et pas les salafistes ou les prières de rue. Pour moi, l’ennemi de la laïcité, c’est l’intégrisme islamique et c’est lui qu’il faut combattre. On n’est plus en 1905 ! Ce n’est pas l’Eglise catholique qui menace la laïcité. C’est l’intégrisme islamique.
Les Républicains doivent-ils se recentrer ?
Tous nos pays européens sont en crise. Il faut être capable de refonder la démocratie. Comment ? En ne trahissant pas les classes moyennes. En Angleterre, les gens qui ont voté pour le Brexit, ce n’étaient pas des ploucs, c’étaient les exclus de la mondialisation. Il faut arrêter de mépriser le peuple. Enfin, il faut des résultats. Emmanuel Macron dit qu’il va lutter contre l’immigration irrégulière mais il diminue le budget pour le faire. Quand on dit qu’on fait du nettoyage mais que la dépense publique augmente et que le déficit public continue de s’alourdir, on ne fait pas le travail. C’est à ces trois conditions seulement qu’on peut redresser la parole démocratique.
Qu’est-ce qui vous différencie du FN ?
Il y a d’immenses différences. La vision du Front National, c’est celle d’une Europe rabougrie qui se replie sur elle-même. Ma vision, c’est celle d’une Europe, d’une France qui retrouve ses fondamentaux pour rayonner. Ensuite, il y a des différences fondamentales sur des sujets très concrets. Prenez l’euro. Marine Le Pen est incapable de donner une réponse sur un sujet aussi fondamental. Pareil sur la politique économique ! Elle n’a aucune approche de lutte contre le gaspillage de l’argent public.
Ce serait Macron qui ferait la politique de la droite …
Non ! La politique menée par Emmanuel Macron n’est pas une politique de droite.
- On ne fait pas de politique de droite quand on augmente la dépense publique.
- On ne fait pas une politique de droite quand on augmente les impôts.
- On ne fait pas une politique de droite quand on dit qu’il n’y a pas de culture française.
- On ne fait pas une politique de droite quand on n’a pas une approche sérieuse des questions régaliennes et de sécurité.
Ce que fait Emmanuel Macron, c’est en gros une politique du centre, ambigüe, consistant à débaucher un coup à gauche et un coup à droite.
Pourtant, Macron a su débaucher à droite …
Parce que la nature humaine est faible. Quand on propose un poste ministériel, il arrive que certains disent le contraire de ce qu’ils disaient la veille. Emmanuel Macron achète des personnes, en mettant des postes sur la table. Est-ce que c’est ça, l’avenir de la politique? Il n’y a pas une démocratie au monde qui fonctionne avec un parti unique central et des extrêmes.
Le danger mortel pour l’avenir de la démocratie française est qu’il n’y ait qu’un gigantesque trou noir dans lequel tous les partis auraient disparu et en face deux extrêmes: Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. Mon devoir est de recréer une alternance démocratique. Ma bataille est de faire en sorte que demain les Français aient le choix. Mon travail est de reconstituer une droite qui est en puzzle. Et de refaire naître la vigueur d’une nouvelle droite.
Mais en avez-vous la force ?
Ma force, c’est que je suis une nouvelle génération. Ma force, c’est que tout a été chamboulé lors de cette élection. Il faut comprendre que je veux reconstruire un monde nouveau à droite. Bien sûr, c’est une période de frictions, de recomposition, mais je l’assume pleinement. Et j’ai fait le choix de ne pas chercher à garder tous ceux qui ont fait le naufrage de ce qu’est la droite aujourd’hui. Mon choix, c’est de faire vivre une nouvelle génération. Mon équipe a 40 ans de moyenne d’âge.
Pour lire l’entretien intégral, c’est par ici.
* le point Godwin : De la loi de Godwin, du nom de Mike Godwin, et de point. Cette loi énonce que « plus une discussion dure longtemps, plus la probabilité d’y trouver une comparaison impliquant les nazis ou Adolf Hitler s’approche de 1 ».
Mike Godwin ne parlant que de « loi » et jamais de « point », c’est le langage courant qui, de cette loi, a tiré par extension le « point » Godwin : moment où, dans un débat, les adversaires s’injurient ou caricaturent grossièrement les positions de l’autre, toute discussion constructive devenant alors impossible.
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