Le culte de l’individu va tuer notre civilisation

Publié par le 2 Fév, 2024 dans Blog | 2 commentaires

Le culte de l’individu va tuer notre civilisation

« Et voyez la révolte des agriculteurs, elle doit être conçue plus du tout comme la révolte de loosers ou de gueules cassées de la mondialisation.

Comme celle des Gilets jaune,

– C’est la révolte de la majorité silencieuse,
– C’est la révolte de la démocratie contre une tentation autoritaire de l’Europe,
– C’est la révolte du bons sens contre la déconnexion,
– C’est la révolte de la raison contre la fuite en avant,
– Peut-être même la révolte de la vie contre la morbidité ! »

Vous venez de lire la conclusion de la magistrale analyse de notre société décadente par Guillaume Bigot dans l’émission Face à l’info du 1 er février (à revoir ici).

J’ai le sentiment que la révolte des paysans français marquera un tournant dans l’histoire politique française. Et que l’horizon s’est peut-être dégagé …

A tous les Français, les paysans ont donné une formidable leçon de démocratie. Après les grèves de fonctionnaires surprotégés après les émeutes de banlieue, leur mouvement plein de dignité et de sens des responsabilités avait quelque chose d’irréel que l’on ne pouvait plus imaginer.

A toute la classe moyenne française, les paysans viennent probablement de redonner un grand espoir en leur faisant prendre conscience qu’elle est encore majoritaire en France, et que ses valeurs ne sont pas désuètes mais consubstantielles de notre civilisation que les élites veulent déconstruire.

Entre l’assistanat qui ruine tous ses efforts, l’immigration qui menace son identité et les élites qui la méprisent, les paysans viennent peut-être de donner à la classe moyenne le courage de se rebeller contre les progressistes et leur Système mortifère.

Voici la suite de la chronique de Guillaume Bigot qui met des mots sur le mal qui nous ronge :

Comment refaire société en France

Christophe Guilluy

Ce qui a rendu célèbre et très avisé le géographe et essayiste Christophe Guilluy, c’est le concept de France périphérique ! Il utilise cette grille de lecture en opposant la France périphérique, celle qu’on ne voit pas mais qui est quand même composée des deux tiers et plus de la France, face à cette France qui a le monopole de la représentation des choses et qui est la France des grandes métropoles mondialisées.

Il lit cette révolte des agriculteurs comme un nouvel épisode de ce soulèvement inéluctable de la France périphérique. Son nouveau livre s’appelle les dépossédés. Comme les Gilets jaunes, les agriculteurs sont des dépossédés, dépossédés de leurs revenus, des moyens de gagner leur vie et donc dépossédés d’une forme de dignité.

Ce n’est pas seulement qu’on marche sur la tête ! C’est on leur a marché sur la tête et ils essayent, tous ces gens-là de relever la tête ! Et le pouvoir, que fait-il, explique Guilluy,  il agit avec ses méthodes d’entreprise de marketing et essaye de segmenter ces révoltes. Ecoutez : ça ne représente pas beaucoup de gens, etc … Guilluy souligne qu’ils ne sont peut-être pas nombreux mais que 82 % des Français les soutiennent !

On voit bien qu’ils sont soutenus par une majorité silencieuse voire même par l’idée d’intérêt général.

Par opposition, il y a cette France des métropoles mondialisées qui apparait comme le point de référence ! Mais en fait, dit Guilluy, ces gens-là sont isolés. Ils se sont auto-isolés, enfermés dans des métropoles citadelles qui, face à la colère des gueux, des agriculteurs sont défendus par les blindés de la gendarmerie. Ils se défendent aussi à coup de blindés intellectuels. Pour Guilluy, le blindé intellectuel de cette France des métropoles mondialisées, ça s’appelle l’extrême droite. En fait, l’extrême droite c’est une arme blindée intellectuelle.

Dès que la réalité dérange le narratif et la vision du monde de cette France des métropoles, ils sortent l’extrême droite. Ils extrême-droitise la réalité qui les dérange !

Parce qu’en fait, ils sont à part, dans une sorte de séparatisme culturel, mais ils ont le monopole de la représentation des choses. C’est eux qui écrivent le scénario ! C’est une domination culturelle, artistique, médiatique sans contrôle. Il se font leur cinéma à travers le cinéma qu’ils contrôlent. Et ce cinéma, il est plein de mondialisation, plein d’ouverture à l’Europe, plein d’ouverture à l’autre, plein de lutte contre le réchauffement climatique, plein d’inclusion, plein de migrants fantastiques qui sont les Victor Hugo de l’avenir ! C’est ça leur vision du monde !

Et donc la révolte des agriculteurs, pour eux,  c’est la révolte du réel face à cette représentation virtuelle des choses.

C’est la révolte de gens qui sont vraiment avec des contraintes énormes, les contraintes climatiques, les contraintes du cours des matières premières, et qu’est-ce que fait cette France virtuelle des métropoles, européiste, et bien elle leur aggrave ce tableau. Elle leur colle des contraintes.

Or, dit Guilluy, cette France des métropoles mondialisées n’a qu’une obsession, c’est le No Limit des marchés. Eux, ils sont dans le No Limit mais ils collent des limites aux autres, en réalité ! C’est absolument incroyable ! Si on prend l’exemple du poulet ukrainien, c’est exactement ça ! C’est le No Limit mondial ! Pour se donner bonne conscience, il n’y a qu’un seul oligarque producteur dont la société est basée à Chypre qui va inonder le marché européen de poulets. Y’a des gens qui vont faire du business avec ça, s’en mettre plein les poche. Sans normes ! 

Bien sûr, ils ne vont pas manger ce poulet-là qui n’est pas très bon. Mais Noblesse n’oblige plus, puisqu’ils n’ont plus de vision de la société. On peut se dire qu’à toutes les époques de l’Histoire, Noblesse doit obliger puisque ceux qui dirigeaient et ceux qui étaient dirigés partageaient quelque chose en commun mais on le voit avec madame Oudéa-Castéra, ou avec monsieur Pap Ndiaye, on le voit avec les sénateurs qui s’augmentent, les règles, c’est pour les autres, c’est pas pour eux !

Gabriel Attal, dans son discours à l’intention des agriculteurs, a prononcé les mots, des mots qui, hier encore, étaient interdits : souveraineté, sécurité, classe moyenne, France même, des mots qui sont censés apaiser la classe moyenne. C’est indiscutable, il y a une prise en compte mais Guilluy reste sceptique avec des mots qui restent assez durs vis-à-vis de Gabriel Attal mais il insiste pour dire que ce n’est pas Gabriel Attal, le problème ! Il n’est pas la cause, en réalité. Il est le symptôme de quelque chose, précisément de cette mentalité, de cette France des métropoles. Il dit :

Gabriel Attal , c’est le produit de l’effondrement culturel et moral généralisé des classes supérieures contemporaines. Il incarne cette bourgeoisie contemporaine, sans colonne vertébrale, et qui distille la moraline du vivre-ensemblisme, de l’écologisme et du féminisme dévoyé. Mais, je ne doute pas de son intelligence, de sa bonne foi, par ailleurs.

Il veut dire que finalement, le Système est acculé et il a sorti la carte de l’image et ce n’est pas un hasard qu’il ait sorti l’image de la jeunesse puisque le Système croit à quoi, au fond ? Il croit au bon plaisir au dessus de tout et ne peut pas sortir de sa matrice, de son système auto-référentiel, du bon plaisir individuel.

En repensant au discours de politique générale du premier ministre, je me suis rendu compte qu’il continuait à dérouler cette logique individuelle et qu’il n’y avait rien sur la société et l’intérêt général. Prenons un exemple :

on va travailler sur l’émancipation des gens qui bossent, la semaine de 4 jours, le télétravail, travailler plus à certains moments de la vie, moins à d’autres …

On a l’impression que c’est un programme pour cadres de chez McKinsey ! C’est pour les cadres sup, pas pour la France qui n’a pas le choix ! Cette affaire de démographie qui est quand même un problème d’intérêt général, un problème très sérieux, par définition, comment est-il abordé ? Il est abordé sous l’angle de l’infertilité, c’est à dire sous l’angle de l’individu ou de couples qui subissent cette souffrance. Mais en réalité, qu’est ce que cache derrière cette montée de l’infertilité, le fait que les femmes commencent à avoir leur premier enfant très tard. Le gouvernement reste dans cette matrice individuelle.

Il n’ose pas dire aux femmes qu’il y a une limite qui s’appelle la biologie !

Prenons un dernier exemple avec l’autorité et le fait que les jeunes turbulents vont être envoyés dans des pensionnats, mais on rajoute … S’ils le souhaitent ! On reste dans la matrice de l’individu ! Rien sur l’intérêt général ! Guiluy dit : c’est pire que l’égoïsme c’est de l’égotisme, du narcissisme  ! Ce Système ne regarde que l’individu. Les individus ne regardent qu’eux-mêmes, ils s’adorent ! C’est un peu Dorian Gray et ça débouche sur quelque chose d’assez morbide et sur un vide existentiel.

Guilluy dit : Gabriel Attal est très sympathique, il est très intelligent mais, en fait, c’est la carte de la jeunesse parce qu’en fait, cette société morbide est obsédée par l’image, obsédée par la jeunesse et en réalité, a tenté de sauver le pouvoir, sauver le Système avec une instagramisation du pouvoir.

Relance de Christine Kelly : Est-ce à dire que les classes moyennes et les plus modestes auraient le monopole du coeur et que les plus aisés seraient forcément des égoïstes immoraux ? Comment refaire société ?

Il n’y a pas de monopole du coeur et ça n’est pas le problème, dit Guilly, de la sincérité. C’est le problème de reconnaître l’autre et reconnaitre qu’il y a autre chose que les individus ? C’est l’intérêt général. Guilluy se réfère à un concept forgé par l’écrivain George Orwell, c’est celui de la décence commune. Ce n’est pas que les gens favorisés ont moins de coeur, c’est pas ça le sujet. C’est que pour les gens moins favorisés, il y a des limites, très rapidement. Et ces limites, c’est ce que Orwell appelle la décence ordinaire qui permet de maintenir les gens ensemble. Il dit :

dans les milieux populaires, où les gens évoluent sans filet de sécurité, souvent sans patrimoine, dans l’insécurité sociale, culturelle, parfois physique, la préservation d’une sorte de décence commune n’est pas vécue comme un empêchement mais comme la seule garantie de survie !

Alors que dans les métropoles mondialisées, on bénéficie d’un monde dérégulé qui a pulvérisé toute notion de limite. La bourgeoisie dite progressiste considère que tout est possible, que ce qui est bien pour elle est bien pour l’humanité et dans ce contexte, l’idée de décence commune est perçue comme un empêchement, comme une limite de la liberté individuelle et ça renvoie à sa propre amoralité.

Et voyez la révolte des agriculteurs, elle doit être conçue plus du tout comme la révolte de loosers ou de gueules cassées de la mondialisation, comme celle des Gilets jaunes, c’est la révolte de la majorité silencieuse, c’est la révolte de la démocratie contre une tentation autoritaire de l’Europe, c’est la révolte du bons sens contre la déconnexion, c’est la révolte de la raison contre la fuite en avant, peut-être même …

… la révolte de la vie contre la morbidité !

Guillaume Bigot pour CNews.

Merci de tweeter cet article :





2 Réponses à “Le culte de l’individu va tuer notre civilisation”

  1. Bien vu.

Laissez une réponse

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *