Quand la gauche renie ses enfants les plus méritants !

Publié par le 15 Sep, 2023 dans Blog | 3 commentaires

Quand la gauche renie ses enfants les plus méritants !

Certains l’auront compris ici, je suis plutôt de droite !

Sauf une aversion contre François Mitterrand et un mépris pour François Hollande, je n’avais pas, jusqu’en 2017, d’exécration contre les hommes politiques de gauche.

Mais l’accession de Macron à l’Elysée a bouleversé le paysage politique français et au lieu de mettre fin, comme prétendu, au clivage gauche-droite, a exacerbé les dissensions entre ces deux bords.

Comment ne pas rejeter aujourd’hui ces députés mal élevés, provocateurs et ces islamogauchistes qui peuplent les rangs de la Nupes? Comment, aussi, ne pas mépriser ces députés socialistes qui ont vendu leur âme à l’extrême gauche pour sauver leur siège ?

Mais avant ces deux calamiteux quinquennats de Macron, je pouvais apprécier pas mal de personnalités politiques de gauche, comme par exemple, Hubert Védrine, Robert Badinter, Jacques Delors, Michel Rocard, Dominique Strauss-Kahn.

Parmi les journalistes, il est plus difficile pour moi d’en apprécier parmi ceux classés à gauche. Mais je retiendrai Jacques Julliard dont j’appréciais la culture et l’ouverture d’esprit comme dans ces nombreuses joutes verbales avec le créateur du magazine Le Point, Claude Imbert.

Voici une très belle chronique de Natacha Polony qui rend hommage à ce grand journaliste qui vient de nous quitter :

« Jacques Julliard, un héritier des Lumières
sali par cette gauche qui les abandonne »

L’époque est aux vociférations spectaculaires, à la pensée résumée pour des séquences télé. L’époque est à l’intolérance, à la facilité. Il en était l’antithèse absolue. Jacques Julliard s’en est allé, et c’est un moment de l’histoire des idées en France qui tout à coup s’éloigne. Une histoire de la gauche, de la République et du progrès. Les lecteurs de Marianne qui attendaient chaque semaine ses mots pesés et ses réflexions mesurées savent combien son arrivée à Marianne en 2010, parce qu’elle ne relevait d’aucune évidence, s’inscrivait dans ces mouvements tectoniques dont le paysage intellectuel français n’a pas fini de ressentir les secousses.

Entre Jacques Julliard, intellectuel de la deuxième gauche, celle de l’autogestion et de la contractualisation, et Marianne fondé par un Jean-François Kahn qui théorisait l’échec et les trahisons de la social-démocratie, la rencontre n’allait pas de soi. Non pas qu’il n’y eût aucune passerelle, bien au contraire. D’abord parce que Marianne a toujours eu vocation à rassembler tous ceux qui, par-delà les clivages idéologiques, partagent la conviction que le bien commun s’élabore ensemble, dans le débat et non dans l’anathème. Dans une époque où les chapelles se murent, où les excommunications se multiplient, Jacques Julliard, l’homme le moins sectaire au monde, a offert à Marianne cette façon libérale de poser sa pensée en ne cessant de la frotter à tout ce qui n’était pas elle. Et c’est sans doute pour cela que nous eûmes tant de plaisir à discuter ensemble, à nous succéder et parfois nous répondre dans les pages de Marianne, lui qui y était depuis huit ans, moi qui y revenais après neuf ans, lui qui venait du rocardisme et de la gauche sociale-démocrate, moi qui venais du chevénementisme et de la gauche républicaine, lui qui était passionnément européen et moi que l’on peignait en « eurosceptique » ou en « souverainiste ». Nous ne fûmes pas toujours d’accord, ni sur la géopolitique ni sur la politique sanitaire, nous eûmes même des désaccords profonds, sur les Gilets jaunes notamment, mais nous nous retrouvions sur l’essentiel.

Au-delà de l’hommage que Marianne doit à cet intellectuel brillant, à cette immense figure du syndicalisme et de la social-démocratie, mais surtout à cet homme d’une humanité profonde et d’une bienveillance rare, il faut aussi raconter ce que son cheminement nous dit de la gauche et, plus généralement, de la France. Jacques Julliard, ces dernières années, a été attaqué, traîné dans la boue parfois, accusé d’avoir « basculé », après tant d’autres, à l’extrême droite.

Procès infâme, qui le meurtrissait plus que tout.

Mais si certains en sont à accuser l’une des incarnations de la deuxième gauche, après avoir depuis longtemps ostracisé la gauche républicaine, celle qui osait parler de Nation, de laïcité, de souveraineté du peuple, c’est bien parce que ces mots de « gauche » et de « droite » ont été peu à peu dévitalisés, vidés de leur substance. Car les nouveaux clivages se dessinent désormais autrement. D’abord parce que, sur les questions économiques et sociales, les conséquences du néolibéralisme, l’incapacité structurelle de l’Union européenne à agir comme une puissance protectrice de ses citoyens et la tentation hégémonique d’une Allemagne fragilisée ont éclaté au grand jour. Être viscéralement européen et attaché à la réconciliation franco-allemande n’empêche pas l’honnête homme de dire ce qui est. « Nous cheminons progressivement l’un vers l’autre », me disait Jacques Julliard.

Mais, plus que tout, le véritable clivage, qui fracture gauche et droite, est aujourd’hui autour de l’héritage des Lumières. Jacques Julliard, admirateur de Condorcet, lecteur de Georges Bernanos et de Simone Weil, a mis au cœur de sa réflexion l’école comme lieu d’émancipation par le savoir. Il a vu avant une grande partie de la gauche sociale-démocrate les limites de cette religion du progrès réduit à l’extension des droits individuels. Et c’est tout le paradoxe : alors que renaît à droite un courant authentiquement réactionnaire, nostalgique d’une société d’ordres, alors que les partis de gouvernement refusent de voir dans l’atomisation de la société une des conséquences du néolibéralisme et de la dérégulation, une part de la gauche abandonne cet héritage des Lumières fondé sur le primat de la raison universelle et sur le projet d’une société permettant aux individus d’échapper aux déterminismes pour s’assembler en dehors de toute référence à une transcendance. Pour le dire simplement, le combat légitime contre les discriminations, s’il ne s’appuie pas sur une vision universaliste de la liberté humaine, devient le prétexte pour réduire le réel à une opposition entre des minorités « dominées » et une majorité « dominante », plutôt que de s’intéresser à l’organisation économique et sociale, aux conditions de production, au rôle de l’État comme garant de l’égalité des chances. Jacques Julliard prédisait dans ses derniers éditoriaux qu’il faudra beaucoup de temps à la gauche pour sortir du marasme intellectuel et des échecs électoraux. Mais, bien plus qu’un camp politique, c’est en fait tout le débat démocratique qui doit être refondé pour que la France ait une chance de se perpétuer comme communauté de citoyens libres et comme promesse de bonheur individuel et collectif.

Natacha Polony pour Marianne.

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3 Réponses à “Quand la gauche renie ses enfants les plus méritants !”

  1. « Voir dans l’atomisation de la société une des conséquences du néolibéralisme et de la dérégulation ». J’aimais bien Polony quand elle s’occupait d’école, il y a longtemps dans le Figaro, je ne savais pas qu’elle avait dérivé à ce point. Parler de dérégulation quand on crève de lois, de règlements, de normes, de contrôles et d’interdictions en tout genre, il fallait le faire !

  2. Tout debat est ostracisé,
    et s’il le faut par des proces infames.

    De pluys le nuiveau au fil des ans a beaucoup baissé, de meme chez les gogoches, voici pourquoi,
    il y a scission entre la goche veritablement intellectuelle d’autrefois cultivée aux valeurs universaliste
    et la gogoche debile pseudo progressiste
    a sa complete derive pseudo culturelle dans les idealismes de plus en plus forcené et caricaturale,
    qui est devenue la seule façon d’etre soi disant intelligent actuellement pour la gogoche felée.

    Il est normal que la gogoche actuelle renie une goche ancienne beaucoup plus cultivée car la gogoche actuelle n’a besoin que d’avoir une reflexion ultra simpliste et binaire… comme tous les imbeciles en ont besoin !

    Se sont les effets du massacre par l’education nationale, sur la culture, le raisonnement etc… qui produit des imbeciles … heureux !

    Si on veut revenir a cette goche ancienne dans lequyels des vertues existaient, comme a droite, il faut refonder l’education nationale qui ne sert les interets que des lobbys et des feles.

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