« Peu après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, des négociateurs des deux camps avaient rédigé un projet d’accord de paix. Un document de 17 pages que « Die Welt » a pu consulter en exclusivité.
Même après plus de deux ans de guerre, l’accord semble toujours avantageux a posteriori. »
Vous venez de lire l’introduction d’un article du Figaro qui expose cet accord russo-ukrainien qui aurait pu éviter l’hécatombe à laquelle nous avons assisté.
Mais dans l’agenda de l’OTAN et des Faucons de Washington, la paix n’était pas à l’ordre du jour mais plutôt la défaite totale de la Russie.
Le document secret qui aurait pu
mettre fin à la guerre en Ukraine
Une solution pacifique aurait pu être trouvée quelques semaines après l’invasion russe de l’Ukraine.
Voilà ce qu’il ressort d’un projet d’accord négocié par les deux belligérants jusqu’au 15 avril 2022. Die Welt a pu consulter le document original. Si l’on en croit ce qu’il contient, Kiev et Moscou s’étaient largement mis d’accord sur les conditions de la fin de la guerre. Seuls quelques points restaient en suspens, des points qui devaient être négociés personnellement par Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky lors d’une rencontre au sommet — qui n’a jamais eu lieu.
Immédiatement après le début de la guerre, des négociateurs russes et ukrainiens avaient commencé à négocier ensemble la fin des hostilités.
Alors que le monde et les Ukrainiens étaient sous le choc de l’invasion russe, Moscou tentait d’obtenir la capitulation de Kiev à la table des négociations.
Après la multiplication des succès de l’Ukraine sur le champ de bataille, la Russie avait même accepté de revoir quelque peu ses positions. Ces discussions avaient finalement débouché sur les premières négociations directes à Istanbul, organisées sous la médiation du président turc Recep Tayyip Erdogan à la fin du mois de mars. Les images de cette rencontre, sur les rives du Bosphore, avaient suscité l’espoir d’une résolution rapide du conflit, d’autant plus que deux parties s’étaient immédiatement attelées à rédiger un projet d’accord.
Une « neutralité permanente »
Les deux belligérants étaient parvenus à se mettre d’accord sur les grandes lignes de la paix. Ainsi, selon l’article 1 du projet d’accord, l’Ukraine s’engageait à une « neutralité permanente ».
Kiev renonçait ainsi à toute appartenance à une alliance militaire, ce qui aurait écarté toute possibilité d’adhésion du pays à l’OTAN.
Les 13 sous-points du premier article précisaient l’étendue de cette neutralité.
Le pays se déclarait ainsi prêt à ne jamais « recevoir, produire ou acquérir » des armes nucléaires, à ne pas autoriser la présence d’armes et de troupes étrangères sur son territoire et à ne pas mettre son infrastructure militaire, y compris ses aérodromes et ses ports maritimes, à la disposition d’un autre pays.
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En outre, Kiev renonçait à organiser des exercices militaires avec la participation de pays étrangers et à prendre part à tout conflit militaire. Selon l’article 3 du document, toutefois, rien ne s’opposait à l’adhésion de Kiev à l’UE.
En contrepartie, la Russie s’engageait à ne pas attaquer à nouveau l’Ukraine. Afin que Kiev puisse s’en assurer, Moscou avait accepté que les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, la Chine et la Russie elle-même, puissent donner à l’Ukraine des garanties de sécurité complètes. Dans l’article 5 du projet d’accord, Kiev et Moscou prévoyaient un mécanisme rappelant la clause d’assistance de l’OTAN.
Droit à l’autodéfense
En cas d’« attaque armée contre l’Ukraine », les États garants s’engageraient à aider Kiev à exercer son droit à l’autodéfense, tel qu’il est garanti par la Charte des Nations unies, dans un délai maximal de trois jours. Cette assistance pourrait prendre la forme d’une « action commune » de toutes les puissances garantes ou de certaines d’entre elles. Selon l’article 15, cet accord aurait dû être ratifié dans chaque État signataire afin de garantir son caractère contraignant en droit international.
Les deux parties avaient ainsi élaboré un mécanisme qui diffère nettement du mémorandum de Budapest de 1994. À l’époque, la Russie avait déjà assuré l’Ukraine de son intégrité territoriale. Les États occidentaux avaient laissé entrevoir qu’ils apporteraient leur soutien à Kiev en cas d’attaque, mais ne l’avaient pas garanti.
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Il n’en demeure pas moins que les garanties de sécurité qui se trouvaient sur la table au printemps 2022 auraient encore nécessité, dans un deuxième temps, l’accord des États-Unis, de la Chine, de la Grande-Bretagne et de la France. La Russie et l’Ukraine souhaitaient en outre inclure respectivement la Biélorussie et la Turquie. L’objectif premier des négociateurs à Istanbul était toutefois de parvenir à un accord entre Kiev et Moscou afin d’utiliser le texte en tant que base pour des négociations multilatérales.
Cela a manifestement été fait à la demande de l’Ukraine, afin de montrer que la Russie accepterait un mécanisme de protection sur le modèle de l’OTAN. Dans les faits, l’Ukraine a ici réussi à faire prévaloir ses idées face à Moscou. La formulation du projet d’accord ressemble en grande partie à celle du communiqué d’Istanbul. Il s’agit d’un document de deux pages dont Die Welt a pu consulter une copie.
L’Ukraine y a présenté ses exigences avant la réunion des négociateurs organisée le 29 mars 2022 à Istanbul, sous la médiation du président turc Erdogan. Suite à ces discussions, les délégations des deux pays ont rédigé le projet d’accord du 15 avril au cours de négociations menées en ligne.
Le mécanisme d’assistance
Il ressort de l’article 8 que la Crimée et le port de Sébastopol sont exclus des garanties de sécurité. Kiev reconnaissait ainsi de facto le contrôle de la péninsule par la Russie. La demande initiale de l’Ukraine, à savoir que le statut de la Crimée soit clarifié dans le cadre de négociations dans les dix à quinze prochaines années, demande à laquelle un passage du communiqué d’Istanbul a été consacré, ne se retrouvait pas dans le projet d’accord.
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Le document ne précise pas quelle partie de l’Ukraine orientale devrait être exclue de la promesse de protection des États garants. Les passages concernés ont été marqués en rouge. Il ressort du communiqué d’Istanbul que Kiev aurait accepté d’exclure certaines parties des oblasts de Donetsk et de Louhansk, que la Russie contrôlait déjà avant le début de la guerre. La délégation russe a en revanche insisté pour que la délimitation des frontières soit effectuée par Poutine et Zelensky en personne et reportée sur une carte.
Une idée qu’a rejetée la délégation ukrainienne. Kiev a demandé que l’on indique où se situe la frontière selon la lecture ukrainienne. Autre problème : la Russie a exigé qu’en cas d’attaque, tous les États garants consentent à activer le mécanisme d’assistance, ce qui aurait donné à Moscou un droit de veto lui permettant de bloquer le mécanisme de protection.
En outre, Moscou a rejeté la demande ukrainienne d’instauration d’une zone d’exclusion aérienne par les États garants en cas d’attaque.
Démilitarisation ukrainienne
Lors des négociations, la Russie a certes signalé qu’elle était prête à retirer ses troupes d’Ukraine, mais pas de la Crimée ni de la partie du Donbass qui devrait être exclue des garanties de sécurité. Les chefs d’État auraient dû discuter directement des détails de ce retrait, comme l’ont confirmé deux négociateurs ukrainiens de manière indépendante au journal Die Welt.
La question de la taille future de l’armée ukrainienne restait également en suspens. Kiev a partiellement répondu à la demande russe de démilitarisation.
Selon l’« Annexe 1 », Moscou exigeait que Kiev réduise son armée à 85.000 soldats …
… alors qu’environ un million y sert actuellement. L’Ukraine, elle, proposait le maintien d’un effectif de 250.000 soldats.
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Les idées divergeaient également quant au nombre d’équipements militaires. Ainsi, alors que la Russie lui demandait de réduire son nombre de chars à 342, Kiev voulait en garder jusqu’à 800. Quant au nombre de véhicules blindés, l’Ukraine ne voulait le réduire qu’à 2400, tandis que la Russie demandait qu’il n’en reste que 1029.
Les divergences étaient tout aussi importantes en ce qui concerne les pièces d’artillerie. Moscou en prévoyait 519, Kiev 1900. Kiev voulait conserver 600 lance-roquettes multiples d’une portée allant jusqu’à 280 kilomètres, alors que la Russie n’en souhaitait que 96 d’une portée maximale de 40 kilomètres. Le nombre de mortiers et de missiles antichars devait être respectivement réduit à 147 et 333 unités selon la volonté de la Russie, contre respectivement 1080 et 2000 selon la volonté de Kiev.
Solution manquée
En outre, l’armée de l’air ukrainienne devait être décimée. Alors que Moscou exigeait le maintien de 102 avions de combat et 35 hélicoptères, Kiev insistait sur le maintien de 160 chasseurs et 144 hélicoptères. Le nombre de navires de guerre devait se limiter à deux selon les Russes, contre huit selon les Ukrainiens.
Même si des points essentiels restaient en suspens, ce projet d’accord montre à quel point on était proche d’un possible accord de paix en avril 2022. Poutine et Zelensky auraient dû régler les points de désaccord restants au cours d’un entretien personnel. Mais après le sommet prometteur d’Istanbul, Moscou a posé des exigences ultérieures que Kiev n’a pas acceptées.
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Elles sont indiquées en italique dans le document. La Russie a ainsi demandé que le russe devienne la deuxième langue officielle en Ukraine, que les sanctions réciproques soient levées et que les plaintes déposées devant les tribunaux internationaux soient abandonnées. Kiev devait également faire interdire par la loi « le fascisme, le nazisme et le nationalisme agressif ».
Comme l’a appris Die Welt de plusieurs diplomates impliqués dans les négociations, l’intérêt pour une solution au printemps 2022 était grand.
La Russie s’était retirée du nord de l’Ukraine après l’échec de son avancée sur Kiev et avait annoncé vouloir se concentrer sur des conquêtes territoriales à l’est. L’Ukraine n’a pu défendre sa capitale qu’au prix d’efforts considérables, aucune livraison d’armes lourdes occidentales n’étant encore au programme.
« Le meilleur accord que nous aurions pu avoir »
Même après plus de deux ans de guerre, l’accord semble toujours avantageux a posteriori. « C’était le meilleur accord que nous aurions pu avoir », a déclaré un membre de la délégation de négociation ukrainienne de l’époque à Die Welt. Depuis des mois, l’Ukraine est sur la défensive et subit de lourdes pertes. Rétrospectivement, elle était alors dans une position de négociation plus forte que celle dans laquelle elle se trouve aujourd’hui. Si l’on avait pu mettre un terme à cette guerre au bout d’environ deux mois, de nombreuses vies auraient pu être sauvées et de nombreuses souffrances épargnées.
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Il ressort de l’article 18 du projet d’accord que les négociateurs pensaient à l’époque que les deux chefs d’État signeraient le document en avril 2022. Lors d’une interview télévisée accordée en novembre 2023, le négociateur ukrainien David Arakhamia est revenu sur la raison pour laquelle Poutine et Zelensky n’ont jamais participé au sommet pour la paix tant attendu.
D’après lui, le Premier ministre britannique de l’époque, Boris Johnson, se serait rendu à Kiev le 9 avril et aurait déclaré que Londres ne signerait « rien » avec Poutine — et que l’Ukraine devait poursuivre les combats. Si Johnson a certes démenti cette affirmation par la suite, on peut supposer que la proposition de donner des garanties de sécurité à l’Ukraine en accord avec la Russie avait déjà échoué à ce moment-là. Des garanties de sécurité dont Ukraine aurait pourtant eu besoin pour se protéger de la Russie à l’avenir.
Lena pour Le Figaro.
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2 Réponses à “Quand l’OTAN sabota l’accord de paix en Ukraine”
On accuse toujours les russes, mais qui fait en sorte de demolir la paix et preferent la voie de la guerre au lieu de negociation ?
Les usa et l’europe pousse a la 3eme guerre mondiale, rien que ça, qui sont les plus nuisibles dans cette affaire ?
C’est une guerre qui ne nous concerne pas, mais les « elites » pourries ce moque de l’opinion des peuples.
Dans cette affaire tout n’a ete que coup fourré, mensonges…
Parce que les usa veulent l’Ukraine a leur bottes.
Les neu neu qui ont participé a cette affaire n’ont rien fait pour faire respecter le pacte.
Quand aux imbeciles qui racontent n’importe quoi chez les merdias, a part quelqu’uns ( Cnews )
ils perdent leur temps avec leur balivernes.