Quand Sardou sauve l’honneur

Publié par le 5 Mar, 2018 dans Blog | 0 commentaire

Quand Sardou sauve l’honneur

« Ne m’appelez plus jamais France ! »

Ce titre d’une chanson de Michel Sardou créée en 1975, a marqué, je le crois, toute une génération de Français !

Il symbolise à lui seul toutes ces valeurs qu’on abandonne au nom du progrès ou réputé tel …

Eric Brunet, dans une chronique parue dans Valeurs actuelles retrace la carrière du chanteur dit populaire, ce que sans doute ne lui pardonne pas la gauche ! C’est l’occasion de se rappeler certains messages politiques distillés dans son répertoire.

C’est si rare de trouver un artiste « de droite » !

En 1974, le gouvernement, oubliant les promesses électorales, décide de désarmer le France. C’est la France qui est touchée. Michel Sardou le criera et fera un tube.

Eric Brunet

C’est l’histoire d’une soirée entre copains, dans un petit estaminet parisien. Le repas se termine en chansons: Brel, Sanson, Brassens, Berger, Johnny, Polnareff. Nous allions nous séparer, un peu après minuit, lorsqu’un couple d’Anglais, plutôt discret jusque-là, se met à chanter le France de Michel Sardou. Alors là, respect ! À la fin du premier couplet, l’élégant British me lance : « Avec ce chanson, vot’ Sardou a lavé l’honneur de vot’ peuple. » Il n’avait pas tort …

Dans les années 1960, le plus grand paquebot du monde était français. Assurant des traversées transatlantiques et des croisières autour du monde, le France était une fierté nationale, comme plus tard le Concorde.

Mais à la suite du choc pétrolier, le paquebot, déjà victime de la concurrence du Queen Elizabeth 2 et des avions à réaction, cessa d’être rentable. En juillet 1974, le gouvernement de Jacques Chirac annonça son désarmement. Cette décision suscita immédiatement l’indignation. On signa des appels, on créa des comités de soutien. La CGT manifesta et, au cours d’une traversée, une mutinerie fut organisée par les membres d’équipage. Mais rien n’y fit : en décembre 1974, on envoya le France croupir au Havre, le long d’un quai proche du complexe pétrochimique, le « quai de l’oubli ».

En 1975, Michel Sardou décide de rendre hommage au célèbre paquebot avec une chanson, simplement intitulée le France (paroles disponibles ici) :

Ne m’appelez plus jamais France.
La France, elle m’a laissé tomber.
Ne m’appelez plus jamais France.
C’est ma dernière volonté.

C’est un énorme carton : en deux semaines, 500 000 disques sont vendus. Au total, un million de 45 tours s’écoulent. La chanson plaît aux Français qui ne digèrent pas l’abandon de ce symbole. Sardou n’en revient pas : sa chanson est saluée par la CGT et le Parti communiste, qui y voient un soutien aux nombreux ouvriers qui travaillaient sur le navire. Sardou chantera même le France à la Fête de l’Huma !

Sacré paradoxe car, cinq ans plus tôt, sa chanson J’habite en France avait été décriée pour son chauvinisme et l’avait propulsé porte-parole du peuple de droite. Et plus tôt, en 1967, il avait inauguré sa carrière par une chanson pamphlet proaméricaine, les Ricains, en réaction à la décision française de quitter le commandement de l’Otan:

Un gars venu de Géorgie,
Qui se foutait pas mal de toi
Est v’nu mourir en Normandie
Un matin où tu n’y étais pas.

Cette chanson avait d’ailleurs été censurée par le pouvoir gaulliste …

Pochette de l’album La Vieille

Cette fois, porté par le succès du France, Sardou sort en 1976 son album encore plus provocateur : la Vieille. Trois chansons créent la polémique. D’abord, le Temps des colonies, où le chanteur se voit accusé d’apologie du colonialisme et que les radios refusent de diffuser. Ensuite Je suis pour, où, campant un père dont l’enfant a été assassiné, il défend la peine de mort. Enfin dans J’accuse, Sardou est accusé d’homophobie pour une phrase:

J’accuse les hommes  de croire des hypocrites.
Moitié pédés moitié hermaphrodites.

Même ses chansons d’amour sont critiquées pour leurs paroles sexistes. Les féministes lui reprochent notamment de faire référence au marquis de Sade dans Je vais t’aimer. Des comités anti-Sardou se créent et tentent d’empêcher ses concerts. Des croix gammées sont peintes sur ses affiches et une bombe sera découverte dans une salle de concert bruxelloise. Deux sociologues publient un essai intitulé Faut-il brûler Sardou ?, dans lequel ils accusent le chanteur d’accointances avec l’extrême droite.

Cette fois, c’est trop. Des artistes de gauche (Le Forestier, Lavilliers, Montand, Reggiani, etc.) défendent le chanteur au nom de la liberté d’expression. Mais lassé des polémiques, Sardou décide de mettre de l’eau dans son vin …

Pourtant, je l’avoue, quand l’Anglais a repris mon couplet préféré, j’ai eu du mal à garder l’oeil sec :

Que le plus grand navire de guerre,
Ait le courage de me couler,
Le cul tourné à Saint-Nazaire,
Pays breton où je suis né !

Eeic Brunet pour Valeurs actuelles.

Merci de tweeter cet article :





Laissez une réponse

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *