Remise de peine pour … mauvaise conduite !

Publié par le 2 Déc, 2017 dans Blog | 0 commentaire

Remise de peine pour … mauvaise conduite !

Dans les urnes, la progression de l’abstention et des votes blancs montre  que le divorce entre le peuple et les « élites » autoproclamées est de plus en plus profond.

L’un des points de rupture porte sur l’un des piliers de notre démocratie : la Justice !

Le bon sens – parfois qualifié de populaire, et méprisé de nos élites – semble avoir totalement quitté les milieux judiciaires au profit de l’application d’une justice idéologique.

La lettre de Laurence Havel, présidente de l’Institut pour la Justice, que je relaye aujourd’hui, illustre cette dérive inquiétante de notre justice :

Chers amis,

Je vais probablement vous faire tomber de votre chaise. Quand vous lirez ce que j’ai découvert, vous n’en reviendrez pas.

Depuis le temps, je pensais avoir tout vu, être blasée. Mais non, il est manifestement possible de descendre toujours plus bas…

De quoi s’agit-il ?

« Cette semaine les détenus du centre pénitentiaire de Baie-Mahault, en Guadeloupe, ont été invités à remettre les armes qu’ils possédaient illégalement. Moyennant quoi, « sous certaines conditions », ils pouvaient se voir attribuer « trente jours supplémentaires de réduction de peine ».

C’était hier dans le journal le Parisien. L’initiative a déjà permis à 62 détenus de bénéficier de réduction de peine, c’est du jamais-vu !

Donc, pour remercier les détenus d’avoir violé les règles de la prison en se fabriquant des armes, l’administration leur offre l’opportunité de passer moins de temps derrière les barreaux !

Centre pénitentiaire de Baie-Mahault – une partie des 155 armes blanches remises à l’administration en échange d’une remise de peine …

En somme, plus vous violez les règlements et moins vous passerez de temps en prison…

Après les remises de peine pour bonne conduite, l’administration pénitentiaire invente les remises de peine pour mauvaise conduite !

Car en effet, dans cette prison, comme dans tant d’autres, il est très facile de façonner des objets dangereux et de les dissimuler. C’est d’ailleurs cette prolifération incontrôlée qui a conduit le Procureur a lancer une telle action. Il y voit de la “prévention”.

Les syndicats pénitentiaires, eux, voient la chose un peu différemment. Le secrétaire national de l’Ufap-Unsa le dit très bien : « à la rigueur, j’aurais pu comprendre qu’en échange de ces armes, il y ait une forme d’immunité et d’absence de poursuites disciplinaires, mais offrir des remises de peine, c’est un constat que l‘administration a baissé les bras… »

Le message est en effet on ne peut plus clair. L’administration dit aux détenus : “nous avons définitivement renoncé à faire respecter les règlements et la discipline carcérale. Faites comme chez vous.”

Et c’est même encore bien pire que cela.

Dans les années 1950, le gouvernement communiste de la Chine décida de se lancer dans une grande campagne d’éradication des rats, en offrant de l’argent à tous ceux qui lui en apporteraient. Que croyez-vous qu’il arrivât ? Les Chinois se mirent à élever des rats dans le fond de leur jardin ou dans leur appartement afin de toucher les primes.

En France, en 2017, l’administration pénitentiaire offre des réductions de peine aux détenus qui lui apportent des armes. Que croyez-vous qu’il arrivera ?

Dans cette prison de 700 détenus pour 450 places, où les gardiens sont débordés, cette initiative va encourager les détenus à fabriquer des armes en tous genres. Elles deviendront alors une monnaie d’échange avec l’administration pour des réductions de peine.

Et si brusquement l’administration change de politique et cesse de récompenser ceux qui lui apportent des armes, eh bien, elles pourront toujours servir…

Et la prochaine étape, ce sera quoi ? Libérer d’office les détenus qui auront eu le bon goût de ne pas mettre le feu à leur cellule ? Accorder la légion d’honneur à ceux qui se seront abstenus de poignarder un gardien ou un co-détenu ?

Soyons sérieux. Ce renoncement est intolérable. Plutôt que de baisser les bras, il faut d’ailleurs prendre le problème à bras le corps. Armes, téléphones, drogues … on le sait, les prisons sont devenues de lieux de trafics qui dépassent les gardiens et l’administration toute entière.

Une des solutions, que nous proposons depuis des années, est la création de nouvelles places de prison en quantité suffisante. Je sais que l’on vous rebat les oreilles avec cela, mais je vous assure qu’en agrandissant le parc carcéral de la France, on règlerait de nombreux problèmes dans nos prisons, qui sont aujourd’hui tabous.

Interrogé en fin de semaine par le Figaro, Me Guillaume Jeanson, le porte-parole de notre association est sans ambiguïté : « Non la création de ces 15.000 places de prison n’est pas un caprice sécuritaire. Elle est la condition indispensable pour que les peines de prison prononcées soient effectivement et rapidement exécutées. Elle est aussi la condition indispensable pour qu’elles le soient dans des conditions humaines dignes de notre démocratie et de nature à permettre de faire du temps de détention un temps utile, pour les détenus, les victimes et la société. »

Malheureusement, nous apprenons que la promesse de campagne du Président de la République de créer 15 000 places de prison ne sera pas réalisée dans le quinquennat. Non, finalement cela prendra deux quinquennats. Au moins. A supposer que cette nouvelle promesse qui annule la précédente soit tenue …

Vous me direz, « oui mais Laurence, les promesses n’engagent que ceux qui y croient … ».

Certes. Je le sais bien. Mais malgré tout je ne me résigne pas.

Je ne désespère pas qu’un jour un gouvernement ait enfin le courage ou l’ambition de faire quelque chose pour nos prisons. Et à l’IPJ nous continuerons à nous battre inlassablement pour essayer de faire entendre raison à nos gouvernants. Pour faire entendre la voix des victimes, et la voix du bon sens.

Mais en attendant, voir des “solutions” de fortune comme celle de la prison de Baie-Mahault pour essayer de contrôler le trafic d’armes me rend très amère.

Car finalement, est-il encore utile de préciser que la justice a besoin au plus vite des places de prison qui lui manquent … et non dans vingt ans ?

Il y va de la sécurité des Français.

Avec tout mon dévouement,

Laurence Havel

Ps : Si vous ne l’avez pas lu ce week-end, voici la tribune de Me Guillaume Jeanson sur les places de prison, tout y est dit !
premium.lefigaro.fr/vox/societe/2017/11/24/31003-20171124ARTFIG00251-construction-de-places-de-prison-un-enjeu-majeur-de-la-presidence-macron.php

Voici un graphique montrant le nombre de places de prions ramené à la population pour les pays européens. La France y prend la 18 ème  place sur 28 !

Mais comme le clamait Christiane Taubira :

« la prison n’est pas la solution … Elle est le problème ! »

 

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