Pour ou contre la Jeanne d’Arc métisse ?

Publié par le 6 Mar, 2018 dans Blog | 0 commentaire

Pour ou contre la Jeanne d’Arc métisse ?

Une polémique était née après le choix d’une jeune femme métisse pour incarner le personnage de Jeanne d’Arc dans la fête annuelle organisée à Orléans.

Ma première réaction avait été d’être choqué par cette polémique qui n’avait pas lieu d’être, la couleur de peau ne m’apparaissant comme un critère discriminant dans le choix de cette personne.

Aux dires des organisateurs les critères de sélection portent sur « la foi catholique, l’altruisme, une moralité irréprochable, la dévotion à Jeanne d’Arc ».

La polémique est retombée mais je suis tombé sur deux textes intéressants et argumentés sur le sujet, deux textes qui défendent deux thèses opposées :

  • Une Jeanne d’Arc de grand coeur de Denis Tillinac,
  • Je n’ai rien contre Mathilde mais le choix d’une Jeanne d’Arc métisse n’est pas anodin par Gersende Bessède.

Je livre ces textes à votre réflexion en reproduisant le texte intégral de Denis Tillinac et des extraits du second article :

Une Jeanne d’Arc de grand coeur

Au mois de mai 2009, j’ai eu le privilège insigne de présider la fête annuelle de Jeanne d’Arc à Orléans. La tradition, presque jamais interrompue, remonte à l’an de grâce 1430, premier anniversaire de la libération de la ville par notre sainte nationale. Je n’oublierai jamais cette journée de ferveur spontanée et de liesse populaire.

Denis Tillinac

Un office religieux est célébré dans la cathédrale en présence des autorités civiles, militaires et religieuses. Trêve des chicaneries pour cet hommage dont l’héroïne de chair porte l’armure des chevaliers d’antan et caracole avec ses pages en tête du cortège. On choisit chaque année une jeune fille du pays orléanais selon des critères très rigoureux: foi catholique, altruisme, moralité irréprochable, dévotion à Jeanne d’Arc. En règle générale, l’heureuse élue exerce des responsabilités dans le scoutisme.

Tel est le cas de la Jeanne de 2018. Elle a 17 ans et s’appelle Mathilde Edey Gamassou. J’imagine sa joie en me souvenant de celle d’Agnès Rabineau, la merveilleuse Jeanne de 2009. Mathilde est métisse, avec des origines polonaises par sa mère et béninoises par son père. Française donc et de grand coeur. Catho et fière de l’être. Des imbéciles rivalisent de vulgarité sur les réseaux sociaux en ironisant sur la couleur de sa peau. Ce racialisme de bas étage, effet pervers de l’idéologie multiculturelle, méconnaît le sens profond de la geste johannique. L’héroïsme de la bergère de Domrémy oppose au légalisme de Créon la légitimité selon Antigone. Légitimité d’essence spirituelle, qui ennoblit la France et nous oblige. Par la grâce de Jeanne, notre patriotisme ne se réduira jamais aux acquêts de la défense d’un pré carré.

Jeanne venait du pays barrois, aux marges d’une France dont les frontières ont notablement varié depuis lors. Son terroir d’origine n’a compté pour rien dans la grandeur de son destin. Elle a servi, jusqu’au bûcher de Rouen, une cause transcendant la simple révolte d’un peuple contre l’envahisseur. Sinon les instits de Jules Ferry n’auraient pas entretenu son culte – sa foi candide avait tout pour désobliger leur positivisme. Si elle trône en souveraine dans le panthéon de notre imaginaire, entre l’histoire et la légende, c’est qu’elle a hissé notre amour de la France à l’altitude d’un idéal. Péguy avait compris cela. Thérèse de Lisieux aussi. Les pulsions racistes sont toujours bêtes. S’agissant de Jeanne d’Arc, elles outragent le patriotisme français.

La France n’est pas un clan, une tribu ou une ethnie. Une âme immémoriale survole ses pleins, ses déliés et ses clochers.

  • Âme tantôt glorieuse et tantôt douloureuse, tissée, déchirée, recousue au long des siècles par les preux, les gueux et les pieux des vitraux de nos cathédrales.
  • Âme trempée dans le sang à Roncevaux pour la légende, à Bouvines, à Marignan, à Fontenoy, au pont d’Arcole, à Valmy, à Verdun et dans les maquis pour l’histoire. 
  • Âme exaltée aux Tourelles par notre Jeanne avec son glaive et son étendard. Âme célébrée par nos poètes dans notre langue, et peu importe si leur peau était blanche ou moins blanche, leur patronyme exotique ou du cru.

Mathilde a été choisie pour incarner Jeanne; c’est qu’elle le mérite. Puisse le fiel de ses détracteurs, comme par hasard anonymes, ne pas abîmer son bonheur ! Puisse-t-il ne pas nourrir une polémique qui salirait la mémoire de Jeanne d’Arc en la commettant dans la banalité d’un débat sur le racisme.

Chère Mathilde, ne te soucie pas de ce tumulte misérable. Prépare-toi à vivre au printemps une fête dont le souvenir ensoleillera tes jours à venir. Elle sera belle. N’écoute pas la voix des imbéciles. Les mêmes où à peu près dissuadaient Charles VII de recevoir Jeanne. Les mêmes ou à peu près allumaient les fagots à Rouen après l’avoir jugée selon un faux légalisme dicté par la haine. Sois joyeuse et sereine, la France que l’on aime sera de tout coeur avec toi.

Denis Tillinac pour Valeurs actuelles.

Le second texte de Gersende Bessède est plus réservé sur le choix de la jeune femme métisse mais cherche surtout à définir ce qu’un tel choix dit de notre société et de son évolution.

Extraits :

Représentante assumée de la « Fachosphère », et adhérant aux thèses de Renaud Camus, Gersende Bessède considère le « Grand remplacement » comme une violence infligée au peuple français. Dans ce contexte de tensions multiculturelles, aucun choix ne paraît innocent.

Et ce qu’il faut dire, c’est que la vraie problématique de cette affaire n’est pas tant de savoir si Mathilde Edey Gamassou aurait le « droit » d’incarner Jeanne d’Arc lors des fêtes johanniques, mais de bien comprendre ce que ce choix signifie. De s’attacher à l’esprit de l’évènement plutôt qu’à la lecture superficielle de sa lettre.

Gersende Bessède

Faisons un peu de politique-fiction pour mieux nous faire comprendre. Imaginons le même choix d’une jeune fille métisse pour incarner Jeanne d’Arc lors des fêtes johanniques dans les années 1950, dans une France qui est donc différente, elle est encore plutôt homogène, l’immigration y est restreinte, majoritairement une immigration de travail d’ailleurs, qui n’est pas destinée à faire souche, et c’est parce que cette immigration est restreinte, qu’elle ne pose aucun problème particulier. Dans ce contexte-là, mettre en avant un modèle d’assimilation réussie ne pose aucun problème en soi, car c’est la belle exception qui confirme la règle. La lettre coïncide alors avec l’esprit. Mais dans la France de 2018, les problématiques ne sont pas les mêmes, si la lettre dit toujours la même chose, l’esprit lui, n’est plus le même.

La France de 2018 n’est plus homogène, l’immigration n’y est plus restreinte, mais massive, et relève si l’on se fie aux statistiques, plus de l’immigration de peuplement (regroupement familial) que de l’immigration de travail. Le déséquilibre démographique, c’est-à-dire le rapport du nombre, est en train de basculer progressivement en défaveur de la population indigène. Et ce phénomène, une population allogène nombreuse, jeune, à la natalité dynamique, face à une population indigène vieillissante, à la natalité faible, c’est cette substitution mécanique par vases communicants que l’on nomme le « Grand remplacement ». Dans ce contexte de « Grand remplacement », que dit le choix de Mathilde Edey Gamassou pour incarner Jeanne d’Arc ?

Que le « Grand remplacement » est tellement en voie d’achèvement que l’on peut sans complexes, se permettre de poser le visage symbolique du remplaçant sur la figure qui incarne le mieux dans le roman national la lutte contre le remplacisme.

Et s’il reste quelques indigènes pour s’en offusquer et refuser de disparaître en silence, on fera comme d’habitude, on les traitera de racistes. Voilà l’esprit de ce choix. Tout simplement.

Il est d’ailleurs notable et très signifiant de voir à l’occasion de cette polémique, que la civilisation européenne, qui a pourtant toujours privilégié l’esprit à la lettre – à l’inverse du djihadisme par exemple -, jusque dans ses textes sacrés soit aujourd’hui totalement incapable d’être autre chose que littéralisme, y compris dans sa perception d’un simple tweet, aussi volatil qu’un propos de comptoir. Peut-être est-ce là, la preuve que nous sommes déjà remplacés dans nos têtes, ni plus ni moins …

Gersende Bessède pour Causeur.fr

Personnellement, j’ai bien noté les remarques de Gersende Bessède mais je reste convaincu par les arguments et le lyrisme de l’article de Denis Tillinac.

Ce sera la Jeanne d’Arc de l’année 2018, une Jeanne d’Arc parmi une multitude d’autres. Une métisse, et pourquoi pas une beurette,  y ont évidemment leur place.

Et vous, qu’en pensez-vous ?

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